lundi 27 août 2007

Un dimanche matin avec Yoko et petits pots très doux au chocolat

Yoko a une vingtaine d'années, une queue de cheval attachée haut et une frange qui souligne ses grands yeux en amande.
Elle porte des chemises de garçon trop grandes pour elle et dont elle laisse toujours défaits les boutons des poignets. Les pantalons aussi sont larges, et elle ne quitte jamais sa grande besace noire qui lui bat les cuisses quand elle prend le train (et cela arrive souvent, pour aller rendre visite à ses parents par exemple. Et j'ai été saisie par les silences laconiques de son père quand il vient la récupérer à la gare. Pour avoir plusieurs fois vécu ces instants-là, je ne peux que reconnaître la justesse du propos: moi aussi, quand mon papa venait me chercher le vendredi soir à la gare de L., j'étais toute embarrassée. Heureuse de le voir mais aussi très gênée de n'avoir rien à dire, avoir peur qu'il s'en rende compte, qu'il pense que je ne l'aime plus mais en même temps incapable de partager avec lui les émotions qui m'habitaient alors, puisqu'il ne m'avait connu qu'à la maison, dans mes pensées adolescentes et qu'elles n'étaient plus tout à fait d'actualité. Incapable d'échanger des banalités ("Il y avait du monde dans le train?" question que posera aussi la belle-mère de Yoko quand ils arriveront à la maison), je me terrais dans un silence qui était probablement très angoissant).
Yoko est journaliste.
Dans son petit studio à Hokkaido, il y a une belle suspension rouge qui descend du plafond, il y a un petit balcon où elle étend son linge avec une grâce sans concurrence (et les fins tee shirts qui se balancent au gré du vent dessinent son grand corps frêle), il y a un réfrigérateur dont sa belle-mère reprochera la vacuité. Il est vrai qu'on ne voit guère Yoko ingurgiter autre chose que plusieurs verres de lait froid et des nouilles instantanées.
Yoko passe beaucoup de temps avec Hajime, un gentil libraire qui trvaille dans le quartier des bouquinistes et qui s'y connait non seulement en graphisme mais aussi en nourritures réconfortantes pour jeunes filles malades.
Dans Café Lumière, le très beau film de Hou Hsiao-Hsien, que j'avais déjà vu un 31 décembre parisien avec G. avant d'aller déguster quelques sushis, se déploie avec beauté et intelligence l'histoire de Yoko qu'on contemple rêver à l'avant des trains ou siroter un lait chaud attablée dans un beau café boisé, sur les traces d'un compositeur disparu et se débattant avec ses propres secrets. Un bonheur pour les yeux et les oreilles (car la bande sonore n'est pas en reste), à déguster un dimanche matin en même temps qu'une tasse de thé vert délicatement parfumé à la fleur de cerisier (le hanami impérial de cette maison-là).

Un autre moment de douceur, celui du dessert, lorsque G. a plongé avec délice sa petite cuillère dans un des petits pots au chocolat et au caramel au beurre salé préparés un soir de pluie d'après une recette simplissime de Philippe Conticini. Si vous les servez à température ambiante, la crème au chocolat sera moelleuse et réconfortante, c'est cette version que je préfère, mais il restait deux petits pots que j'ai mis au réfrigérateur pour le lendemain, il ne s'agit alors plus du tout du même dessert, la crème étant devenue ganache et laissant en bouche une sensation "plus riche". Philippe Conticini utilise du beurre doux pour le caramel et saupoudre au dernier moment les petites crèmes de fleur de sel. Comme je n'en avais pas, j'ai fait un caramel au beurre salé. Il parsème aussi les crèmes de pralin mais après concertation multidisciplinaire, il fut décidé de s'abstenir.

Les petits pots très doux chocolat/caramel au beurre salé

Pour quatre petits pots
La crème au chocolat
-150g de chocolat à 66% de cacao
-5cL de lait
-7cL de crème fraîche

Le caramel au beurre salé (je n'ai pas tout utilisé pour les petits pots, il est très bon avec les yaourts aussi)
-150g de sucre
-3 cuillères à soupe d'eau
-5cL de lait
-5cL de crème fraîche
-10g de beurre salé

Et pour servir: des gavottes et quelques gouttes de crème fraîche

Commencer par préparer le caramel: faire cuire le sucre et l'eau dans une casserole à fond épais. En attendant qu'il prenne une couleur blond foncé, faire bouillir le lait et le crème. Quand le caramel est presque roux, verser le mélange lacté bouillant en trois fois et bien mélanger. Laisser reposer.
Pour la crème au chocolat, faire chauffer le lait et la crème et verser ce mélange très chaud sur le chocolat préalablement concassé. Mélanger doucement.
Répartir la crème au chocolat encore chaude dans les verres, recouvrir d'une petite couche de caramel et d'une goutte de crème fraîche. Laisser refroidir à température ambiante.
Déguster avec les gavottes, contrepoint délicieusement craquant à toute cette onctuosité.


D'autres recettes de Philippe Conticini à déguster sans alibi:
Une crème renversée à tomber
Une indécente pizza chocolabricot

jeudi 23 août 2007

La petite fille au sourire grave et le saumon qui guérit tout

Pour aller à l'école maternelle, il fallait passer près d'un gros buisson chargé de fleurs roses dont les abeilles étaient friandes. Aux beaux jours, je demandais à ma maman de changer soigneusement de trottoir. On habitait alors au premier étage d'une très grande maison aux volets bleus et dont la propriétaire, qui vivait au rez-de-chaussée, était une vieille femme acariâtre qui adorait venir sonner les après-midis où ma maman se reposait de sa nuit de travail pour nous montrer ses derniers travaux d'aiguille. Elle avait deux monstrueux colleys qui me filaient une frousse folle.
Dans la cour de l'école, il y avait un grand bac à sable ovale. Au début de chaque récréation, les maîtresses vidaient dans ce bac un énorme tonneau d'où dégringolaient des seaux, des petites pelles et des truelles. Il fallait un peu jouer des coudes pour attraper quelque chose. Il y avait souvent une truelle rouge dont personne ne voulait.
Je n'osais pas trop m'aventurer par là. Je n'osais pas trop non plus m'approcher du tourniquet blanc dont la vitesse me paraissait incontrôlable, j'avais l'impression que c'était une machine à faire vomir. Non, ce que j'aimais, c'était aller derrière de gros troncs d'arbre délaissés creuser des petits puits où je déposais avec concentration divers pépins de pommes et de citrons, espérant fébrilement qu'apparaîtraient un jour de grands arbres dont les branches ploieraient sous le poids de fruits à la peau brillante.
Je me souviens avoir appris à faire des oiseaux-pompons, j'ai peint un galet à mon effigie (allez savoir pourquoi, je m'étais attribuée une peau noire et une bouche très rose), j'ai laissé l'empreinte de ma main droite dans une petite galette en terre cuite, j'ai dessiné une maison et un soleil avec des légumes secs, j'ai fait un pot à crayons en collant des images découpées extraites de catalogues de jardinerie sur des boîtes de conserve.
Sur les photos, j'ai la barette sur le côté, le col est roulé et le sourire grave.
Pour la rentrée au cp, j'avais un cartable de garçon, bleu et noir, que je détestais. On s'y était pris la veille du premier jour de classe, il ne restait plus grand chose. Pour se rattraper, mon papa m'offrait régulièrement des gommes en forme de coeur, des stylos qui écrivaient en rose et dont l'encre sentait la fraise, des crayons aux mines colorées interchangeables. Ma maman couvrait mes livres d'abord avec du papier kraft standard puis, pour égayer tout ça, mettait une deuxième couche d'un papier transparent avec des petites fleurs. Sur le chemin de l'école, il n'y avait plus d'abeilles; par contre elle me faisait épeler quelques mots de son choix ( d-o-i-g-t, p-n-e-u, t-o-r-t-u-e). J'ai détesté le cp, et toutes les années d'école primaire, j'ai détesté leur gâteau au yaourt qui râpait la langue, j'ai détesté leur compote aux pommes ("Patoumi, je t'ai demandé d'éplucher les pommes, pas de les couper en morceaux"), j'ai détesté la fête annuelle des écoles où les petites filles étaient obligées de porter d'infâmes culottes bouffantes sous de très courtes robes rouges et où l'on était contraint de se trémousser sur des musiques imbéciles. Je me souviens qu'on m'a reproché de réciter du Anatole France trop tristement, je me souviens qu'on m'a fait pleurer jusqu'à ce que je hoquette d'une voix entrecoupée de sanglots les couplets stupides d'une chanson qui s'appelait "Toc le tapir", je me souviens qu'on a convoqué mes parents parce que je n'avais pas su reproduire un tube digestif.
Mais à cette époque-là, il y avait aussi les sucres d'orge que m'achetaient mes parents chez la marchande de thé, le goût du sorbet à la noix de coco de ma maman, les petits sandwiches qu'elle me préparait pour les mercredis où j'étais toute seule dans le sinistre appartement et puis, l'un de mes plats préférés alors, le saumon caramélisé qu'elle émiettait dans un petit bol de riz chaud et que je dégustais à la petite cuillère.


Le saumon caramélisé pas que pour les enfants, pas tout à fait le même que celui de ma maman

Pour deux personnes
-deux beaux pavés de saumon (biologique, label rouge, sauvage, ce que vous voulez mais surtout qui n'aura pas été nourri avec trop de saletés)
-3 cuillères à soupe de jus d'orange
-3 cuillères à soupe de sirop d'érable
-6 cuillères à soupe de sauce soja
-du poivre du moulin
-un gros pouce de gingembre en petits morceaux
-un filet d'huile d'olive
-de la coriandre ou de la ciboulette, selon vos goûts

La veille du jour où vous avez prévu de repenser à votre maman (enfin, à la mienne mais donc aussi à la vôtre, par association), vous mélangerez tous les ingrédients dans le plat où reposera votre saumon lors de son passage au four. Si vous pensez à l'arroser de temps en temps de sa marinade ou de retourner les pavés, ça ne sera que mieux.
Au moment de dîner, alors que le riz est presque cuit (ou qu'il est gardé au chaud grâce à cette fabuleuse fonction de votre rice cooker), enfournez le poisson dans un four à 180° et surveillez: trop cuit, c'est moins bon.

Pour répondre aux gentilles interrogations d'un grand chef qui s'apprête à passer une année studieuse, ma nouvelle tasse préférée vient d'une microscopique boutique d'affiches de film à Porto, mais je crois qu'il y en a au Conran shop.

Pour le jeté de lit (question fort pertinente je trouve), c'est pour moi comme une belle couverture dans un tissu un peu noble, dont on recouvre le reste du lit. Mais il y a peut-être une définition plus officielle...

dimanche 19 août 2007

Panna cotta très citron, épicerie biologique et histoires de cantine

L'hôtel où nous avons passé quelques jours à Porto était très joli. Je n'aurais jamais osé assortir des oreillers orange à un jeté de lit violet mais ils l'ont fait et c'était plutôt réussi. Du balcon de la chambre, on pouvait voir la devanture d'une épicerie/salon de thé biologique dont la façade vert pâle avait probablement été peinte il y a peu. Sachez qu'après une longue journée pendant laquelle vous aurez beaucoup marché et déjeuné d'un finalement médiocre club sandwich (mais les petits sablés nappés de chocolat achetés un peu plus tôt dans une très fréquentée pâtisserie où, dans l'arrière salle, les gens dévoraient avec appétit d'énormes sandwiches au cochon de lait grillé, étaient plutôt pas mal. Ils ressemblaient beaucoup aux petites galettes de la maman de Martin Winckler, en plus beurrés. Oh! vous ai-je raconté que Martin W. m'avait envoyé un petit mail suite à la lecture de ce billet? C'était très gentil; nous avions déjà échangé quelques courriers à une époque, il m'avait même remercié parmi plein d'autres personnes, à la fin de Plume d'Ange. Bon, au détour d'un plus récent mail lu dans le hall d'un très bel hôtel de Coimbra, ce monsieur pour qui l'écoute du patient est un acte fondamental de soin, me dit qu'il ne faut pas que je m'en fasse, de toute façon, il est évident que je ne suis pas faite pour être psychiatre. Quelle remarque délicate et pleine d'attention de la part de quelqu'un qui ne vous connait pas et qui ne sait pas quelle est votre appréhension du monde, et de la médecine! Quelle écoute! Je ne suis plus très sûre de vouloir lire ses bouquins) vous serez ravis de vous installer sur la terrasse de ce salon de thé. A l'abri du bruit de la ville, assis sur de belles chaises toutes blanches qui semblent venues de pays froids, vous lèverez les yeux sur les cimes graciles qui s'élancent sans fin dans le jardin attenant à la terrasse. Vous n'entendrez que le doux pépiement des oiseaux qui s'y reposent. Vous humerez les plants de menthe, de thym, de romarin qui bordent le jardin. La maîtresse de maison est une jeune femme très mince, à la peau mate, aux cheveux tout bouclés, elle porte avec une classe très personnelle un tee shirt gris à l'effigie de Caliméro, un bermuda en jean et des sabots dont certaines avaient déjà remarqué le potentiel. Son sourire est empreint d'une telle bienveillance que nous lui demanderons, un peu plus tard, quelques bonnes adresses pour satisfaire nos papilles exigeantes. Elle sera de très bon conseil: grâce à elle goûterons-nous le soir-même, confortablement installés sur une banquette en velours rouge, un délicieux tartare de saumon avec de la pomme verte au wasabi. Et cet après-midi-là, elle posera sur de jolis sets colorés, un jus d'orange fraîchement pressé, le meilleur que vous ayez bu jusqu'ici, un jus de raisin biologique, des toasts tout chauds de pain aux céréales avec du beurre de soja étonnament bon et une confiture de fraises qui n'a plus besoin de faire ses preuves. Moment délicieux de quiétude et de gourmandise.

Après le goûter, vous irez vous extasier sur les jolis produits disposés sur les étagères de bois clair et vous ressortirez de ce bel endroit le sourire aux lèvres et munis d'un grand sac en papier kraft contenant du miel, de la compote de fraise, des chips de panais/betteraves/carottes, du thé blanc, des biscuits au gingembre et au chocolat noir et une délicieuse sauce barbecue, irrésistible dans son pot old-fashionned.
Vous avez tellement aimé ce moment que vous reviendrez y déjeuner le lendemain. Vous rêvasserez devant la fine colonne de petits cygnes colorés en origami qui dégringole du plafond. Derrière le comptoir, la même serveuse sortira de son réfrigérateur smeg les ingrédients nécessaires aux sandwiches que vous aurez commandés: chèvre/miel/noix et puis pesto de roquette/crème de soja/tomate. Très simple et juste délicieux.
Ces temps-ci, en fin d'après-midi, une fois rentrée à la maison après avoir écouté le garçon qui a tué son chat après que celui-ci l'a mordu ou la dame qui est persuadée d'être enceinte mais en fait c'est impossible, j'adore boire un thé dans ma jolie tasse Pride and prejudice tout en feuilletant les livres qui s'empilent au pied du canapé gris-bleu. J'ai beaucoup souri les temps derniers en parcourant Cantines qui propose, sur une très bonne idée d'Emmanuel Rubin (qui écrit sacrément bien dis donc! C'est un bonheur de lire ses souvenirs de carottes râpées, de poulet basquaise, de sardines à l'huile et surtout de cordon-bleu pané page 92) et de Sébastien Demorand (qui n'est pas en reste: il évoque brillament pâtes trop cuites, côtes de porc sauce charcutière -mon dieu, mais qu'est-ce? J'ai dû demander à G. si ça existait vraiment. "Mais oui ma petite patoumi, et même que c'est très bon quand c'est bien fait."-, et autres alouettes sans tête), on parcourt à la fois des souvenirs de cantines très joliment racontés par des gens qui aiment bien bien manger (mesdemoiselles Clotilde Dussoulier et Keda Black entre autres, qui se souviennent de la glace bigoût et des endives au jambon) et puis des recettes de chefs qui revisitent les classiques de collectivité (ah! le cassoulet canaille d'Hélène Darroze, la mousse au chocolat et au pavot bleu de Sébastien Gaudard, le steak haché/haricots verts -au miso!- façon Philippe Delacourcelle ou encore la crêpe jambon/fromage de Jean-François Piège). Le tout est entrecoupé de photos ludiques et pleines d'humour où se croisent personnages Playmobil et poupées Barbies décapitées.
Pour faire simple et commencer la semaine en douceur, j'avais choisi d'essayer la panna cotta au citron de Sophie Brissaud, qu'elle sert accompagnée de fromage blanc vanillé et d'un sirop au muscovado. J'ai ajouté du jus de citron, j'ai zappé le sirop, j'ai voulu le remplacer par des shortbreads au thé vert mais ce fut un vrai fiasco et seule la poubelle en aura profité, j'ai goûté avec circonspection avec du fromage blanc et effectivement, c'est comme ça que cette panna cotta est délicieuse!

Panna cotta très citron
Pour quatre petits ramequins

-2 cuillères à soupe de lemon curd fait maison ou acheté parce que vous êtes parfois un peu paresseuse, mais quand vous ne l'êtes pas, vous restez fidèle à la recette de Pascale
-20cl de crème fleurette + 3 cuillères à soupe
-le jus d'un demi citron
-une demie cuillère à café d'agar agar

Dans une petite casserole, délayer le lemon curd avec les 3 cuillères de crème.
Ajouter le reste de la crème, mélanger soigneusement et faire chauffer sur feu doux.
Ajouter l'agar agar et porter à ébullition.
Verser dans quatre ramequins et laisser refroidir à température ambiante avant d'entreposer six bonnes heures au réfrigérateur (qui n'est pas nécessairement un smeg mais que vous êtes ravie d'avoir décoré de petits cadres en plastique coloré où l'on peut voir, grâce aux travaux pratiques de G. dans l'un, turquoise, Maggie Cheung et Tony Leung, dans l'autre, cassis, Woody Allen, Diane Keaton, Alan Alda et Angelica Huston, tout ce petit monde étant en train de dîner au restaurant).

jeudi 16 août 2007

Des mariages et la douce acidité épicée d'un nahm prik

On a suivi les panneaux pour arriver jusqu'au long chemin poussiéreux qui serpentait à travers les vignes. Il y avait déjà plusieurs voitures garées le long des buissons de lavande. Les abeilles qui vrombissaient autour m'ont un peu intimidée.
Sur la terrasse, une soupe de champagne était en train d'être servie; j'ai préféré un verre de jus de pommes bio et j'ai choisi sur un plateau doré un toast au saumon fumé. Je me suis assise à l'ombre et j'ai observé. J'ai remarqué que deux dames avaient la même robe vert d'eau, je me suis souvenue que j'aimais beaucoup cette couleur quand j'étais enfant, c'était celle de mon pyjama préféré. J'ai vu aussi que le 2.55 de Chanel faisait l'objet de nombreuses imitations. Moi j'avais un sac-cabas acheté il y a peu dans une boutique d'artisanat urbain de Sintra; ce n'est pas vraiment un sac de mariage: il est en tissu, rouge rayé de blanc, avec une grande fleur en tissu posé comme une broche. J'y avais glissé tout un tas d'objets contra-phobiques et même un livre de cuisine, convoité depuis longtemps et déniché à prix doux chez un bouquiniste, en parfait état. Mais je vous en reparlerai. J'avais pensé que ce sac vitaminerait un peu la tenue très simple que j'avais adoptée: une robe comme une chemise que l'on noue à la taille, des chaussures plates. Fidèle à moi-même, pas de bijoux, ni de maquillage. Juste des lunettes de soleil, mais de toute façon, le climat les rendait obligatoires.
Il y avait aussi des enfants, des petites filles en robes blanches qu'elles avaient déjà tâchées en mangeant un peu violemment quelques groseilles.
La longue traîne de la mariée balayait le sol dans un doux frou-frou.
J'ai eu le temps de boire deux verres de jus de pomme, un de pamplemousse, j'ai décliné l'invitation à goûter aux petits coeurs de canards et aussi aux petits boudins antillais, j'ai choisi une tartelette à la tomate sur un autre plateau doré et puis il a fallu partir à la recherche de nos noms sur le plan de table.
Peu après que nous nous sommes installés, mon voisin de gauche a déploré avec fougue l'échec de M. Alain Juppé aux législatives et a assuré à sa voisine qu'ils allaient tout faire au parti pour qu'il puisse revenir brillamment sur le devant de la scène. Ce ton satisfait et suffisant m'a coupé l'appétit; ça tombait bien, je n'aime pas trop le sorbet au melon.
Hier soir, alors que la pluie s'abattait en rafales sur le pavé rennais, nous avons regardé Gertrud, le très beau film de Dreyer. Dans sa robe rayée à manches gigot, Gertrud annonce très dignement à son mari sur le point de devenir ministre, qu'elle s'apprête à reprendre la liberté qu'elle a perdue en l'épousant. La blonde Gertrud, sous sa jolie cape blanche, aspire à un amour entier, qui comble corps et âme, mais se heurte à l'égoïsme des hommes et à sa propre exigence. Quand on est intransigeant avec la vie, on n'aime pas trop les compromis.
J'aime la douceur des soirées à la maison... La préparation du dîner se fait fenêtre grande ouverte sur le ciel qui rosit, et il y a parfois un peu de vin dans les jolis petits verres en cristal qui appartenaient autrefois aux grands-parents de G. Dans une ambiance joyeuse, la discussion était incessante et joyeuse lors de la confection de ce nahm prik parfumé et acidulé.
Le nahm prik est un plat thaï pour lequel il s'agit de confectionner au mortier une pâte épicée dont l'ingrédient primordial est la pâte-de-crevettes-qui-pue et que l'on peut ensuite cuisiner avec un poisson ou une viande. La saveur de celui-ci est très agréable, bien relevée sans être agressive.

Un nahm prik cochon et tomates
Pour deux personnes

Pour la pâte
-un piment rouge égrainé et émincé
-une grosse pincée de sel
-une cuillère à soupe de citronnelle hachée
-une cuillère à café de pâte de crevettes
-2 échalotes hachées
-3 gousses d'ail hachées
-4 tomates pas trop grosses et pas trop mûres

Les autres ingrédients
-environ 300g de cochon haché (de l'échine, par exemple)
-du sucre de palme
-du nuoc mam
-un demi citron vert
-un peu d'huile neutre

Ecraser ensemble tous les ingrédients de la pâte puis la faire revenir dans un peu d'huile jusqu'à ce qu'elle dégage un parfum appétissant.
Ajouter alors la viande hachée et faire cuire sans cesser de remuer et en évitant que des grumeaux ne se forment.
Quand le porc est cuit, il s'agit d'assaisonner avec le sucre de palme, le soja et le nuoc mam, c'est un peu en fonction des goûts de chacun (ici, d'après les souvenirs de G. qui a réalisé cette étape, un demi palet de sucre de palme et cinq cuillères à soupe de nuoc mam).
Servir bien chaud avec du riz parfumé, des rondelles de citron vert, quelques haricots verts cuits à la vapeur et rafraîchis ou quelques tranches de concombre.

jeudi 9 août 2007

La vie des morts et les petites crêpes au raisin frais

On s'ennuie ferme dans la petite ville de province où j'ai grandi. Récemment encore, je me demandais ce qui avait convaincu mes parents de s'installer là, à L., une commune sans intérêt du Morbihan, alors que nous venions de si loin et qu'il aurait été sans doute plus facile de trouver du travail dans une grande agglomération. Mais sûrement n'ont-ils pas eu le choix, et peut-être les associations qui aidaient les immigrés étaient-elles plus actives à L.
Toujours est-il que je me souviens de jours gris dans une ville sans odeurs ni couleurs, où si l'on voulait aller au cinéma, il fallait prendre un bus incertain et cela pour se retrouver dans de minuscules salles qui sentaient le pipi ou devant un film atrocement doublé. Alors on n'allait pas souvent au cinéma.
Heureusement, il y avait à L. une médiathèque où l'on pouvait choisir des cassettes vidéos en triant dans de grands bacs un peu hauts pour moi des fiches plastifiées qui racontaient un peu -trop- le film. On ne pouvait prendre qu'un film à chaque fois, ce qui n'est pas très pratique quand on vient le samedi et que le film est regardé dans la nuit même, en secret, après avoir descendu sur la pointe des pieds les marches de l'escalier en bois, une fois que tous les autres sont endormis, puisqu'il faut attendre le mercredi suivant pour revoir un autre film et trois jours sans cinéma, c'était long. Surtout à L. où le temps passait si lentement. Commis presque comme un acte religieux, le visionnage du film était vécu comme un moment de recueillement, avec ce sentiment étrange d'assister à quelque chose de rare, de précieux et qu'égoïstement on n'a pas du tout envie de partager avec un tiers. Bon, j'avoue que parfois, je m'ennuyais ferme et il m'arrivait de me réveiller sur le canapé devant l'écran noir de la télé, le magnétoscope encore allumé, la cassette s'étant rembobinée toute seule une fois la bande entièrement diffusée. J'ai revu plus tard certains films que j'avais trouvés soporifiques et j'ai compris que tout n'était qu'affaire de moment (ainsi à 14 ans, préoccupée par votre appareil dentaire et autres disgrâces adolescentes, peut-être trouverez normal de piquer du nez devant Le diable probablement).
Dans la salle de la médiathèque où l'on choisissait sa fiche plastifiée, il y avait aussi des Cahiers du cinéma et je me souviens du numéro spécial Nouvelle Vague rempli de photos de films que j'avais tant aimés regarder et dont il avait été si difficile de se séparer en rendant la cassette tant je m'étais sentie comprise. Je mourais d'envie d'y arracher des pages mais quand même, j'étais bien élevée.
Heureusement il y avait aussi le Cinéma de minuit et je guettais fébrilement dans le programme télé du journal local le titre du film de la semaine. Le magnétoscope était mon ami et j'empilais les cassettes au pied de mon lit, attendant le moment propice à un visionnage que je considérais presque comme un acte sacré. J'aimais bien regarder un film en noir et blanc après avoir rédigé plusieurs copies doubles d'une dissertation de français pour laquelle je m'étais prise à la dernière minute, persuadée que dans l'urgence, mes idées jailliraient avec d'autant plus de pertinence. Ainsi avais-je enregistré La notte et je me souviendrai toujours de l'étreinte désespérée de Jeanne Moreau et Marcello Mastroianni lors du matin qui suit l'éprouvante nuit qu'ils viennent de passer. Et puis j'ai vu L'avventura et je n'ai jamais oublié le regard myope éperdu de Monica Vitti, cheveux au vent. Ces images m'habitent, comme la scène d'amour orange dans Un homme et une femme, comme les silences des deux Anglaises, comme Jean Seberg battant le pavé avec le New York Herald Tribune, comme le regard de Mariel Hemingway quand elle se fait larguer par Woody Allen. Tous ils me tenaient compagnie dans des moments d'infinie solitude où la vie me semblait insupportable tant que je n'arriverai pas moi aussi à produire quelque chose de beau, quelque chose qui tiendrait comme cela compagnie aux gens seuls qui ne savent comment aller à l'encontre du monde sans en souffrir.
J'aime les silences qu'il y a dans les films, quand le son devient indésirable et seule l'expression des visages, l'intensité des situations sont alors nécessaires. Le premier Bergman que G. m'a montré, c'était La honte et je n'en revenais pas d'être restée si longtemps à côté de cela. Les films de Bergman sont violents et doux, âpres, arides et sensuels. Ils nouent la gorge mais font du bien au coeur.
J'ai appris la mort d'Ingmar Bergman en feuilletant un journal portugais devant le comptoir du réceptionniste d'un hôtel de Porto. Je n'y ai pas cru tout de suite.
Le lendemain en allant acheter une bouteille d'eau dans une petite gargotte, un autre quotidien local m'annonce la mort de Michelangelo Antonioni. Je n'ai pas compris tout de suite qu'ils étaient morts le même jour. L'espace d'une seconde, je me suis sentie abandonnée, mais juste une seconde parce qu'il y avait la main de G. dans la mienne. Leurs films m'avaient tellement tenu compagnie, leur travail me paraissait tellement courageux et réussis... Bergman montre à la fois avec violence et de délicatesse les tourments de l'âme et avec sa disparition, le temps d'un instant, j'ai pensé que je ne ressentirai plus jamais cela. J'ai pensé à Rohmer, et j'ai eu peur qu'il meure aussi. J'ai pensé à un petit moment télévisé il y a deux ans de cela je crois, où l'on voit Claude Levi-Strauss, extrêmement vieux, à la diction extrêmement lente, dire avec quel effroi il fallait qu'il se prépare à mourir dans le monde tel qu'il est désormais. Je ne connais pas personnellement tous ces gens mais ce qu'ils ont créé ont tellement contribué à me rendre la vie plus douce et la solitude comme un bienfait, que je ne peux me consoler de la disparition de certains qu'en pensant que leurs oeuvres continueront à circuler et que si je veux revoir La notte, cela reste possible.
Alors j'ai demandé à G. si on ne pourrait pas regarder Les fraises sauvages ou Cris et chuchotements ou Persona.
Je lui ai demandé aussi si des petites crêpes au raisin frais avec un verre de lait bien froid l'interesseraient pour le goûter.
C'était super bon.

Les petites crêpes au raisin frais (inspirées d'ici)
Pour une vingtaine de petites crêpes

-2 oeufs
-1/2 cuillère à café d'extrait naturel de vanille
-3 cuillères à soupe de rapadura
-150g de raisin noir à gros grains
-40g de farine T55
-une demie cuillère à café de levure
-un peu de beurre demi sel

Couper les grains de raisins en tranches (environ quatre tranches par grain). Retirer les pépins.
Séparer les blancs des jaunes.
Battre les blancs en neige.
Fouetter les jaunes avec le sucre.
Ajouter la farine, la levure. Mélanger.
Incorporer délicatement les blancs en neige puis ajouter les raisins.
Faire fondre le beurre dans une grande poêle à feu doux.
Déposer des cuillères à soupe de pâte. Surveiller: une fois qu'une face est dorée, retourner précautionneusement la petite crêpe et faire dorer l'autre face.
Déguster tiède: c'est irrésistible.

Une pensée, un sourire et plein de remerciements pour les filles qui aiment s'asseoir à l'ombre des figuiers, celles qui viennent de l'est et savent lire entre les lignes et celles qui aiment se promener à travers les vignes.

dimanche 5 août 2007

Vendredi Wallpaper et samedi soir comme à Ischia

La veille du retour en Bretagne, nous avons rentabilisé avec un certain plaisir le fin guide Phaidon vert pomme acheté à la petite boutique du joli Musée d'art contemporain de Porto. Ainsi, s'il vous reste une journée à passer à Lisbonne avant de reprendre l'avion vous pourrez vous balader dans les rues du Bairro Alto et peut-être entrerez-vous dans une jolie épicerie fine où vous ne saurez résister à de petites assiettes fleuries qui vous feront irrésistiblement penser aux robes étroites de Maggie Cheung quand elle est in the mood for love. Vous noterez avec attention la coiffure de la vendeuse qui collera avec soin un noeud doré sur l'emballage vert de vos nouvelles acquisitions: la mèche sur le côté est fixée haut avec une grande barrette turquoise comme celle que vous portiez sur la photo de classe de moyenne section de maternelle.
Pour vous rafraîchir après une marche quelque peu éprouvante sur des pavés inégaux (car bien sûr vous portez des petites sandales, adaptées à la robe manches ballons qui vous sied par temps chauds mais dont la semelle désespérément plate et lisse manque parfois de vous faire glisser si vous n'êtes pas vigilante) sous un soleil de plomb, vous pourrez vous installer dans la belle salle colorée du Noobai café, à moins que vous ne préfériez leur terrasse d'où vous aurez une vue imprenable sur le Tage, ample et majestueux. En attendant qu'on vous apporte une délicieuse Noobai salad avec une part de tarte à la carotte et au piment, vous pourrez délasser votre gorge et votre corps tout entier en sirotant un jus de mangue au gingembre ou alors un jus d'ananas parfumé à la menthe.
Vous vous laisseriez bien aller à une petite sieste adaptée au climat et à l'heure dans l'un des gros fauteuils de la salle mais vous teniez aussi à passer au musée du Chiado avant de repartir, ainsi retrouverez vous les pavés surchauffés. Les terrasses seront pleines à craquer mais après la visite et une petite balade, vous préférerez quoi qu'il arrive le calme végétal du Basta cafe-jardim où dans une jolie cour arborée vous pourrez boire un grand verre de lait frais qui vous sera servi avec du sucre et un bâton de cannelle, et puis vous goûterez leur généreux crumble aux pommes. L'ambiance est à la quiétude: dans un coin un hamac se balance; allongées sur un banc ou lovées dans un gros fauteuil mou, des jeunes filles ont les yeux clos. Mais, redynamisée par la fraîcheur du lait et les filets de miel qui striaient la glace à la vanille accompagnant le crumble, vous déciderez peut-être de vous lancer dans un simili Pictionnary où il s'agit de faire deviner à votre moitié quelques titres de films à partir de petits dessins qui finiront par recouvrir les deux serviettes en papier du goûter (pendant longtemps, j'étais incapable de jouer à cela pour deux raisons très simples: je dessine très mal et je suis restée traumatisée par le souvenir d'un retour d'hivernales vacances vénitiennes où dans l'avion, malgré l'incontestable talent pictural de G., je n'avais pas su retrouver l'expression Rien de grand sans passion). Ainsi rirez-vous beaucoup devant quelques inénarrables rébus dont voici quelques échantillons.



Les miens sont plus obscurs...

Pour votre dernier dîner lisboète, vous pourrez vous passer d'aller au Restaurante Paladar car si l'endroit est trendy et la carte alléchante (il y a du saumon grillé en croûte de citron avec des pois gourmands sautés ou du canard avec de la purée de petits pois à la menthe par exemple), le personnel est indélicat et les cuisiniers que vous pouvez observer puisque la cuisine est ouverte sur la salle, beaucoup trop stressés pour faire de bonnes choses. Vous aurez alors une pensée émue pour le poulet à l'étouffé servi avec de simples spaghettis parfaitement cuits que vous aura préparé une gentille dame tenant un salon de thé dans l'une des rues principales de Sintra (où vous aurez adoré passer deux jours, dormant dans un joli manoir saumon aux chambres vastes et claires et visitant des palais comme irréels, perdus dans de luxuriantes végétations et où rôdait pour l'un d'entre eux l'ombre de Lord Byron). Vous repenserez peut-être aussi à ce dîner japonais lors duquel, assise les jambes croisées de part et d'autre d'une table laquée dans une alcôve isolée du reste de la salle par un petit rideau, vous aurez goûté à de delicieux sashimis et à un katsudon accompagné de lamelles jaune vif de daikon mariné disposés comme autant de tranches de soleil.

Le lendemain, vous vous lèverez tôt et vous serez encore toute ensommeillée dans le taxi qui vous emmènera à l'aéroport. Dans l'avion, vous serez assise à côté d'un Japonais qui voyage avec la seule compagnie d'un sac en plastique noir où l'on apprend en lettres dorées qu'il fréquente des Fashion bookshops.
Pour patienter avant l'arrivée du train qui vous ramène en Bretagne, vous acheterez des magazines féminins où l'on vous invite à tester votre potentiel érotique mais vous serez bien plus intéressée par l'article sur Ischia, l'île qui rivalise avec Capri dans le Golfe de Naples, et où il paraît que le dimanche, on aime déguster le lapin à l'ischitana, une spécialité que prépare avec amour Rossana Foglia pour ceux qui s'arrêtent dans sa chambre d'hôtes perdue au milieu des vignes et qui recueillera tous les suffrages ce samedi soir de "retour à la maison".

Le lapin à l'ischitana
Je vous mets quasiment la recette originale de Rossana Foglia, réalisée avec un lapin entier et prévue pour quatre personnes mais dans la vraie vie, pour deux amoureux, j'ai utilisé deux cuisses de lapin et aussi rajouté un peu de sirop d'érable, parce que les samedis soirs d'août, à Rennes, il est impossible de trouver d'aussi bonnes tomates que celles charnues du marché et on doit ainsi se contenter de quelques boîtes du placard.

-un lapin coupé en morceaux avec son foie, acheté chez votre boucher, s'il n'est pas en vacances
-20 cl d'huile d'olive
-un piment rouge émincé
-3 gousses d'ail pressées
-un bel oignon (ou des petits oignons nouveaux) émincé
-cinq fines tranches de pancetta coupées en petits bouts
-25 cl de vin blanc sec
-du thym, du persil plat, de la marjolaine
-8 petites tomates en quartiers
-du sel, du poivre du moulin
-les pâtes que vous aimez, ici des tortiglioni des Abruzzes
-du parmesan

Dans une sauteuse, faire colorer les morceaux de lapin dans l'huile d'olive avec le piment, l'ail, l'oignon et la pancetta. Saler modérément. Faire cuire ainsi pendant une vingtaine de minutes en remuant (oui, c'est un peu sport je trouve aussi).
Quand la viande a pris des couleurs, mouiller progressivement avec le vin blanc.
Quand le vin est évaporé, ajouter les tomates, les herbes et le foie du lapin.
Laisser mijoter à découvert pendant trois quarts d'heure.
Avant la fin de la cuisson et selon nécessaire à la cuisson des pâtes choisies, mettre celles-ci à cuire. Peut-être que la sauce du lapin sera un peu épaisse, une louche d'eau de cuisson des pâtes sera alors la bienvenue.
Les pâtes prêtes, sortir le lapin et le garder au chaud. Verser alors les pâtes dans la sauteuse, bien remuer, poivrer au moulin et râper un généreux morceau de parmesan.
Servir comme il vous plaira: à Ischia, on déguste d'abord les pâtes puis le lapin, mais ici, on a bien aimé goûter les deux ensemble.

A quoi penserai-je demain dans le bus qui m'emmène à l'hôpital? Je suis toute contente de travailler là-bas, au milieu du garçon qui a arrêté de manger parce qu'il est persuadé que la nourriture est empoisonnée ou de la jeune fille qui ne supporte tellement pas d'être abandonnée qu'elle veut chaque fois en mourir, et puis je suis aussi atrocement angoissée à l'idée de ne jamais pouvoir faire ce métier.