mardi 2 septembre 2008

Une mauvaise fille (qui n'a plus faim)

Dimanche matin, j'ai essayé d'appeler E. Je voulais lui parler de la sortie prochaine du film d'Emmanuel Bourdieu, de mon cake en forme de fleur mêlant myrtilles et groseilles dans une confusion ratée et nous aurions sûrement évoqué les dernières frasques de ma petite soeur. E. n'était pas là et je n'aime pas, c'est d'un commun mais bon, parler aux répondeurs.
Je n'ai pas de nouvelles de Gé. depuis plusieurs semaines, ça me râpe le coeur calibre gros trous. Je ne sais pas quoi faire, s'il faut insister ou si ce silence veut dire "Laisse-moi tranquille". Je me demande si j'ai commis un impair. Je passe nos dernières conversations au tamis. Mes cils se mouillent.
Un lendemain de garde lors de laquelle j'avais découvert avec circonspection la conception qu'a l'hôpital des tomates farcies (il s'agit, voyez-vous, d'une galette de vieux boeuf haché qui surmonte une pauvre tomate acidissime. Mon co interne du jour, peut-être déprimé par son retour de vacances, les a avalées bruyamment en disant "Ca fait longtemps que je n'avais pas aussi bien mangé à l'internat". Je dois être d'un naturel difficile, en fait), j'ai trouvé dans la boîte aux lettres une petite enveloppe rose avec un joli timbre. Je me retiens de l'ouvrir dans l'ascenseur. Puis, confortablement installée sur le canapé du bureau que j'ai déplié et recouvert d'une serviette de plage pour faire genre c'est les vacances, je bois un thé aux fleurs en lisant la lettre de J., que je n'ai pas vu depuis si longtemps, qui peut-être ne me reconnaîtrait pas, qui sans doute me connaît si bien, qui rattrape le temps perdu. Je suis étourdie par le ravissement. Alors pourquoi mets-je tant de temps à me résoudre à lui écrire à nouveau? Nul ne peut comprendre ce qui n'est pas dit. A savoir dans ce cas: je suis tellement contente que vous soyez là. Et que vous ayez fait la tarte au citron de Marguerite D.
Je n'ai jamais rappelé Sa. alors qu'il y a son numéro de téléphone sur un post it à côté de ma lampe de chevet et de vieux numéros des Cahiers du cinéma. J'avais promis à Sa. un goûter avec un gâteau tout moelleux et je ne tiens pas ma promesse. Je m'en veux. Et je ne fais rien. Boudez-moi, je ne mérite pas mieux.
C. a acheté une maison que j'ai déjà vue en photo et qu'elle m'a invitée à visiter mais je suis comme pétrifiée, je n'arrive pas à l'appeler.
R. m'a envoyé la plus jolie carte postale de l'été. Mais je ne sais pas comment lui dire, comme elle m'a fait plaisir. Alors je ne dis rien. Et sans doute me trouve-t-elle très impolie ou pire, inconséquente.
Dans le bus 64 de 8H45 désormais, j'ai été reconnue par I., une lectrice attentive des Lubies. Ce matin j'avais mille questions au bord des lèvres mais je n'ai pas osé. Du coup, elle a cru m'embarrasser alors que la voir me réjouissait... J'espère que nous nous rattraperons la semaine prochaine autour d'un thé.
J'ai dîné avec S. un mercredi dans un restaurant mauve et gris. Je ne sais pas si c'est la coupe de champagne mais ce soir-là, on s'est compris. Et même que ça fait beaucoup de bien. Et que j'aime bien les petites photos qu'il m'envoie, comme un album qui le dessine en creux. Sauf qu'il est de plus en plus probable (sauf intervention divine) que bientôt je quitte Rennes et j'ai peur que S. ne devienne aussi flou que certaines de ses photos.
Les bras de G. et ses baisers recollent les filles cassées avec délicatesse. On va dîner de foie gras à la pimprenelle et de naans au fromage brûlants, on partage en terrasse divers liquides colorés, on goûte à la mélisse et à la saucisse turque, on s'offre des livres qui s'empilent gracieusement dans les recoins du salon, je m'endors parfois aussi sur sa veste.
La vie est un peu moins compliquée au creux de ses bras.