mercredi 20 décembre 2006

Du pingouin au lapin, une sauce verte, des courgettes farcies, des rêves

Lors de notre dernière matinée à Londres, nous avions décidé d'aller au musée du design, situé à l'est de la ville, en bord de Tamise. Avant de rencontrer G., je n'avais qu'une vision fragmentée et simpliste du design, disons que je connaissais Starck et la boutique du premier étage du Centre Pompidou. G. aime bien, quand il s'interesse à quelque chose, acquérir un savoir encyclopédique sur le sujet, ce qui le fait acheter moult ouvrages qui s'y rapportent. Ainsi ai-je vu sa bibliothèque s'enrichir de livres sur la Chine, et des romans chinois, des livres sur la bande dessinée et des bandes dessinées, des livres de graphisme, d'architecture, de cinéma, et puis la psychanalyse... Grâce à la collection de ceux sur le design et les ballades dans diverses galeries, à force aussi d'en entendre parler et de feuilleter les magazines entreposés dans nos toilettes (parmi les magazines féminins et de cuisine), j'identifie mieux qui a fait quoi et quand.
Ce samedi matin-là, à Londres, il faisait un temps terrible, à faire se retourner les parapluies, et nous fûmes bien contents d'arriver rapidement au musée. Le jeune homme à la billetterie était fort sympathique, il cherchait pour sa grille de mots croisés, un peintre français du XVIIIème, en cinq lettres, connu pour ses paysages. Nous n'avions pas pu l'aider et j'avoue que je ne vois toujours pas.
Après une expo sur les voitures de formule 1 où nos pas se sont faits rapides, il y avait une très chouette salle sur les livres de chez Penguin, avec de vieux exemplaires aux couvertures superbes. Une Japonaise très lookée, qui portait un joli béret, a pris de nombreuses photos.
Avant de quitter le Design Museum, nous sommes restés quelques temps à leur boutique. Ils avaient les jolies tasses que j'avais déjà vues au Conran Shop de la rue du Bac et que j'ai regrettées de ne pas avoir acheté (ce sont des mugs qui reprennent précisément des couvertures de romans de chez Penguin) mais ils n'avaient pas la seule que je convoitais, à savoir Wuthering Heights; j'ai lu deux fois les amours tourmentées de Catherine et Heathcliff, j'aime beaucoup l'ambiance de landes désolées qui règne dans le roman. Nous sommes cependant ressortis de la boutique avec cet autre joli livre d'où est tirée l'illustration du début de ce post.
Les rives de la Tamise n'étaient guère clémentes, nous avions les cheveux dans tous les sens, à cause du vent, et nous avons désespérément chercher un endroit où déjeuner. Lassés par de multiples déconvenues et commettant l'erreur de ne pas profiter une nouvelle fois d'un Prêt à manger, nous jetâmes notre dévolu sur une pizzeria déserte (oui, ça aurait dû nous paraître louche mais quand on a faim, on ne réfléchit plus beaucoup) et nous avons sans doute mangé les plus infâmes pizzas au prosciutto de notre existence. Tant pis, le but était alors de se nourrir. Je précise quand même que nous avons aussi très bien dîné à Londres, notammant à HK Dinner où nous étions rentrés par hasard et où j'ai découvert avec bonheur qu'on pouvait y déguster de délicieux zenzoo (comme ici, à Paris) parfait pour rafraîchir nos langues brûlées par un savoureux stir fried lamb with chili sauce.
Puis, après ces insipides pizzas, nous sommes allés voir des portraits de Modigliani à la Royal Academy of Arts, bondée en ce samedi après-midi, de Londoniens chics qui adorent pérorer et stagner des heures devant les tableaux sans se soucier des autres visiteurs. C'est très étrange de se retrouver au sein d'une foule extrêmement compacte tout en étant dévisagé par les regards obliques des personnages de Modigliani. Il est bon dans ces situations d'être deux et j'aime bien sentir la main de G. dans la mienne, et puis l'écouter murmurer ce qu'il imagine de la vie de ces femmes au visage allongé.
Tout ça pour dire qu'il y a une semaine et pour la première fois de ma vie, j'ai mangé du lapin. Ceci est arrivé après un élan spontané de G. devant la vitrine de notre volailler (qui vend du lapin, je sais, c'est bizarre) devant l'argument qu'on ne peut pas aimer les bonnes choses et n'avoir jamais goûté de lapin dans son existence. J'avais toujours écarté cette éventualité à cause du lapin blanc d'Alice, de Buggs Bunny et de Peter the rabbit, mais celui du volailler a finit dans mon panier et j'étais désormais impatiente de voir comment G. allait me le faire découvrir.
Finalement, ce fut simple et délicieux. Comme G. avait une certaine nostalgie de la façon dont sa grand-mère préparait la petite bête quand lui-même était petit garçon, il l'a simplement fait rôtir avec sel, poivre et huile d'olive avant de récupérer le jus de cuisson qu'il a mélangé avec du persil, du cerfeuil, de l'ail, du vinaigre balsamique et le foie du lapin coupé en minuscules morceaux. Pour m'appâter, il a servi le plat avec des grosses pâtes au beurre et au parmesan fraîchement râpé et je dois avouer que j'ai trouvé ça divin.
Le lendemain, j'ai pû exercer mes talents de chirurgienne contrariée (voyez-vous, j'aime beaucoup ça la petite chirurgie, ouvrir, résséquer, suturer et tout ça, mais je déteste l'ambiance qui règne dans les blocs opératoires et surtout, ce que je préfère en médecine, c'est écouter les gens me parler d'eux et ce n'est pas possible quand ils sont anesthésiés...) en récupérant tous les morceaux charnus restés sur la bête et comme deux courgettes s'ennuyaient dans la cuisine, je les en ai farcies.


Les courgettes farcies au lapin rôti de Patoumi

-2 courgettes
-un reste de lapin rôti coupés en minuscules morceaux
-un oignon rouge émincé
-de l'ail écrasé
-du persil
-une grosse cuillère à soupe de crème fraîche
-une grosse cuillère à soupe de parmesan
-un quart de boule de mozzarella di buffala en petits dés
-du jambon cru en tout petits morceaux
-de l'huile d'olive, du sel, du poivre

Couper les courgettes en deux dans le sens de la longueur, les vider, garder la chair.
Faire revenir dans un peu d'huile d'olive l'oignon et la chair des courgettes.
Ajouter cette préparations à tous les autres ingrédients dans un saladier.
Bien mélanger.
Farcir les courgettes et les laisser au four une demie heure à 180°.

Gracianne me demandait dans son dernier commentaire à quoi je pouvais bien rêver quand je m'ennuie (et cela arrive souvent à l'hôpital depuis lundi), cela dépend mais j'aime bien penser à des vacances à Biarritz, quand on dîne le soir de délicieux tapas sur le port, ou alors je revois le visage de Shu Qi qui se tourne vers nous au début de Millenium Mambo dont G. m'a offert le dvd il y a peu et que nous avons regardé avec plaisir, et parfois aussi, je pense aux réalisations des uns et des autres sur les blogs de cuisine et je suis impatiente que cette année se termine pour enfin faire le métier auquel j'aspire et avoir plus de temps à consacrer aux fourneaux!

samedi 16 décembre 2006

A quoi rêvent les petites filles (quand elles s'ennuient au restaurant)?

D'habitude quand nous rentrons du marché et bien que nous soyons extrêment chargés (mais j'aime bien avoir le cabas qui déborde avec le poireau qui tente de s'échapper), nous faisons toujours une halte chez un bouquiniste à côté d'un magasin de robes de mariée qui vend des modèles particulièrement laids (sur le chemin il y a aussi: une boutique chic et branchée qui expose en vitrine des petits ensembles Vanessa Bruno, une bijouterie qui propose des bagues anciennes vraiment jolies mais qui ne m'iraient pas du tout -la dernière fois, il y avait une grosse bague en bel ébène sertie de quelques minuscules diamants-, des magasins de déco inégaux mais systématiquement bondés, un tailleur pour homme, le coiffeur de G...).
Il y a souvent de bonnes surprises sur l'étal de ce bouquiniste, notamment au rayon cuisine. J'y avais déniché un livre sur la cuisine américaine très joliment illustré qui reprend toutes leurs spécialités région par région; j'aime beaucoup ça, avoir une vaste et précise vision des pratiques culinaires d'un pays. G. a très hâte d'y retourner feuilleter un livre de cuisine espagnole.
Ces midis-là, nous déjeunons souvent du contenu du cabas, je trouve ça infiniment agréable de manger quelque chose qui vient d'être acheté pour la simple raison qu'on en avait envie (et pas parce qu'il faut manger équilibré ou que le produit avait un prix abordable ou je ne sais quoi d'autre; j'avoue que parfois j'ai une sorte de grand surmoi qui me dicte mon menu selon ce que je pense être bon pour mon organisme alors que pour mes papilles, c'est juste bof bof... Oui je sais, on peut combiner les deux, et c'est ce qui se passe le plus souvent, mais quand même, quand je mange du fenouil ou des navets ou des poires ou du potiron, ce n'est pas tout à fait parce que j'aime ça. Complètement maso la Patoumi!), que le produit était beau, sentait bon et qu'en plus, la personne qui le vend est gentille. Quel plaisir!
Mais samedi dernier, avant d'aller au marché, en allant choisir un sapin, nous avons découvert un nouveau salon de thé-restaurant, coincé entre une agence de relooking et une boutique Oliviers and Co. Ce genre d'établissement faisant cruellement défaut à Rennes, nous avons décidé d'y déjeuner. Le boudoir, ça s'appelle.
Pendant que nous achevions une crème brûlée au thé plutôt réussie, une petite fille est entrée avec ses parents. Ils se sont installés à une table, perpendiculairement à la nôtre. La maman est une grande femme blonde au visage marqué. Le papa est un costaud monsieur brun, à la voix puissante, qui ôte avec une virilité calculée son écharpe en cachemire (comment je sais que c'est du cachemire? Peu importe, disons que ça y ressemble fortement). La petite fille a de longs cheveux châtains, avec une coiffure d'adulte, et le regard de celles qui trouvent déjà que la vie est d'un ennui infini. Ils commandent pour elle la même chose qu'eux, à savoir une grande assiette de charcuterie et de fromages italiens, ils demandent juste que le verre de vin prévu avec soit remplacé par quelque chose de plus adapté pour les enfants. Pour eux, ils demandent aussi une bouteille de vin. Quand les assiettes sont servies, ils ne lui souhaitent pas un bon appétit, ils discutent à deux et ne lui demandent pas non plus si elle trouve ça bon. Je la regarde à la dérobée, elle a un beau visage terriblement triste. Quand la gentille serveuse vient leur proposer un dessert (de la crème brûlée au thé donc, un gâteau sicilien, du fondant au chocolat, un crumble poire-figues, un sorbet citron avec une soupe au kiwi), ils disent "Non merci, juste un café." Et puis se tournent vers elle: "Ah mais toi tu veux peut-être quelque chose?" Puis répondent à sa place: "Bon, le chocolat tu n'aimes pas ça. Alors, quoi? Rien. Y'a rien pour toi" Tout cela n'est pas du tout dit méchamment, au contraire, le ton est plutôt prévenant. La petite fille n'a pas l'air spécialement affectée, peut-être est-ce l'habitude, je ne sais, elle a juste l'air ailleurs.

Au marché nous avions acheté des cubes de noix de coco séchée pour faire des muffins fraise-coco, ce n'était pas une franche réussite. Heureusement, je n'en avais fais qu'un à ce parfum, les autres étaient au chocolat, et c'était bien mieux. Pour prendre ma revanche sur les malheureux sablés menthe-chocolat (oh Eva, je sais que tu n'aimes pas ça, désolée), j'ai fait la version muffin avec de la menthe séchée et, whaou!, c'était délicieux! Je n'ose vous donner la recette des muffins, je crois que chacun a la sienne, j'utilise juste du lait ribot et de la farine T65.
Je vous souhaite un excellent weekend, lumineux et gourmand.

lundi 11 décembre 2006

En pensant au hachou parmentier et au cheesecake marbré devant une infâme salade de blé et un yaourt presque périmé

Vendredi soir, j'étais de garde à l'hôpital. Cela implique d'arriver aux urgences pédiatriques à dix-huit heures et n'en repartir qu'à huit heures le lendemain, après avoir longuement écouté une ado suicidaire, des dizaines de parents angoissés, plusieurs coeurs et plusieurs poumons, palpé les ventres, regardé les oreilles, les gorges, la peau, les yeux , comment il marche, et puis aussi on discute avec les enfants, on fait un puzzle pour les faire patienter, on lit une histoire... C'est un peu épuisant.
En fait, quand une garde se rapproche, j'y pense souvent déjà tous les jours de la semaine qui la précède. J'ai toujours peur de ce qui va arriver. Si certains peuvent déplorer la complaisance qu'avait la série Urgences à se gargariser du malheur et de la souffrance d'autrui, je trouvais pour ma part qu'il y était très bien restitué la solitude et l'angoisse de l'étudiant en médecine (Carter à ses débuts, Lucy Knight que j'aimais bien parce qu'elle était un peu gauche, ce qui n'est pas sans me rappeler quelqu'un, hum hum...). J'ai toute une série de petits rituels destinés à faire bouclier contre les agressions extérieures (parce que c'est cela que je trouve le plus difficile: se sentir démuni face aux interrogations des parents qui ne comprennent pas pourquoi on ne trouve pas la cause des pleurs incessants de bébé, sans parler des multiples humiliations devant les supérieurs hiérarchiques même si je tiens à préciser que les internes et les chefs de pédiatrie ont une approche souvent plus humaine de l'individu que leurs collègues des urgences standards -c'est là qu'Urgences pêche, on s'attend à trouver Mark Green et on se retrouve face à une ribambelle de Romano, bref-): je mets toujours des vêtements mous qui ne craignent rien, qui datent un peu et dans lesquels je me sens bien (ça peut paraître évident mais il arrive à certaines personnes de venir en garde avec une mini et des talons qui font clac-clac, chacun ses rituels), j'achète systématiquement avant de partir un magazine féminin qui me permettra, si j'ai l'occasion d'aller me coucher dans la monacale chambre de garde qui n'était même pas chauffée la dernière fois que j'y étais, d'essayer de penser à des choses futiles pour trouver un semblant de sommeil tranquille (de toute façon, si jamais je peux monter me coucher, je ne dors pas vraiment: j'ai toujours peur que le gros téléphone sonne et qu'il faille remettre la blouse) et puis j'ai dans mes poches un tas d'objets strictement utilitaires mais qui me rassurent: un tube de baume à lèvres, un petit réveil de voyage, un carnet noir Moleskine...
En réalité, je suis toujours terriblement angoissée quand je prépare mas affaires, quand je quitte la maison, et puis, quand j'arrive dans le service, je suis lancée, il y a mille choses à faire, on n'a pas trop le temps de penser à soi. Cette fois-ci quand j'ai pris le métro pour y aller, j'entendais une collégienne dire à sa maman: "On n'était que treize en cours de français cet après-midi: une fille a fait un malaise, une autre avait mal au ventre, une autre s'est déplacée une vertèbre en sport..." Je me suis dit: "Aïe aïe aïe, tout ce petit monde doit être en train d'attendre aux urgences..."
Vers une heure et demie du matin, on a eu le droit de faire une petite pause repas et là, horreur, dans le frigo de l'internat, il y a: des coquillettes à la bolognaise qui ressemblent à du vomi, des tranches de pâté viandé d'un rose douteux et qui me regardent avec leurs multiples yeux gras, du fromage aux croûtes toutes désséchées, du pain mou, du beurre fluo, des betteraves qui nagent dans de la vinaigrette, des carottes qui ont été râpées il y a au moins un mois... Comme j'ai un peu faim et que l'idée d'avoir à affronter la nuit l'estomac vide me paraît mission impossible, je me résouds à goûter une petite salade de blé dans sa barquette en plastique. Je ne veux pas charger le tableau mais je précise quand même qu'on mange au bout d'une table où s'alignent tous les reliefs du dîner de ceux qui nous ont précédé, parce que quand on est médecin bien sûr, on ne débarrasse pas hum hum bis. Bon, cette salade était insipide et pour la faire passer, exactement comme je pensais à du gâteau au chocolat quand ma maman me forçait à manger des oranges, j'ai pensé très fort à notre hachou parmentier de la veille et au cheesecake marbré d'il y a quelques jours.
Le hachou parmentier est un délicieux plat d'hiver, réconfortant, parfait après avoir décoré votre sapin et pris quelques photos pour les pupilles de Madame Papilles. Vous faites revenir un oignon rouge coupé en lanières avec du chou émincé et de la très bonne chair à saucisse de votre boucher préféré. Vous assaisonnez comme il vous plaira. Vous répartissez la préparation dans un plat à gratin. Vous faites une belle purée de pommes de terre (ici, elles viennent de l'île de Batz, j'adore cette idée de légumes insulaires). Vous en recouvrez le hachou. Vous lissez la surface et vous laissez à four très chaud pendant un quart d'heure. Vous vous passez de dessert.

Mais ce soir-là, en avalant mon yaourt nature qui approchait dangereusement de sa date de péremption, j'ai quand même pensé à du cheesecake marbré. Je voulais faire un beau marbrage, chocolat blanc/chocolat noir, mais je ne sais pour quelle raison, le blanc a cédé au noir et je me suis juste retrouvée avec quelques malheureuses stries blanches. J'avais recyclé des produits laitiers du frigo dans une improvisation spontanée, le résultat fut vraiment convaincant: la texture était crémeuse et fondante sans être écoeurante, le chocolat était bien présent. La recette est absolument approximative, je m'en excuse, en réalité, j'ai fait ce cheesecake très très vite en rentrant un midi, parce que je ne voulais pas me remettre immédiatement au travail mais que je ne voulais pas non plus perdre trop de temps (c'est définitif: passer l'internat, ça rend fou). Je n'ai ainsi rien pesé. Pour la base, c'est souvent la même: des Sprits, des Speculoos, un peu de beurre. Pour la crème, cette fois-ci: du mascarpone, du fromage frais, un peu de crème, un oeuf, un voile de sucre. Je l'ai divisé en deux et ajouté à l'une du chocolat noir fondu, à l'autre du chocolat blanc dans le même état. Ah! c'était tellement meilleur que ce yaourt!

Vers quatre heures, comme c'était calme, je suis montée me coucher et j'ai ainsi pu découvrir les fiches cuisine de Elle avec un joli menu new-yorkais qui comporte un cheesecake en dessert! Il y aussi, comme idée de plat de fêtes, un échiquier de foie gras et de chocolat qui ferait sûrement sensation.
J'ai quitté l'hôpital vers huit heures trente avec un sentiment de soulagement infini, même si le trajet jusqu'à l'arrêt de métro avec mon énorme sac à dos rouge et sous une mesquine pluie froide me paraissait interminable. J'aime bien quand même quand je rentre d'une garde le weekend faire une surprise à G. pour le petit- déjeuner et je fais donc souvent un détour par la boulangerie Hoche où j'ai choisi cette fois-ci du pain brioché (délicieux avec du beurre demi-sel et de la marmelade de citron) et un kateven, un pain-gâteau à la mie très douce, juste un peu sucrée. Quand je suis sortie de la boulangerie, il ne pleuvait plus et le ciel était en feu au-dessus de l'église Saint-Sauveur.
A la maison, j'ai pris un plaisir inouï à me doucher, G. s'est réveillé et je l'ai entendu me préparer mon chocolat pendant que je poussais de petits cris en découvrant sur mon bureau un joli paquet cadeau. C'était Le rose, dix façon de le préparer, aux Editions de L'Epure. La garde était déjà loin, le weekend s'annonçait bien.

lundi 4 décembre 2006

Tea time parfum citron-fraises séchées, le rêve d'une journée sur une plage anglaise

On est le 29 Août et on se lève un peu plus tôt que d'habitude; on sait que dans deux jours, il faudra plier bagages et déjà on pense davantage aux fastidieuses journées qui se profilent plutôt qu'à celles, radieuses, des beaux jours d'été.
Le petit déjeuner sera rapide mais agréable. Pour ma part, quelle que soit la saison, quel que soit l'endroit, je bois invariablement depuis plus de dix ans une tasse de chocolat chaud, du Poulain Grand Arôme, dans sa boîte en plastique orange. Dans mon dernier appartement, où j'ai vécu quatre ans, j'avais aligné toutes les boîtes consommées en petit muret, façon Campbell's soup, ce n'était pas trop laid. Je suis tellement attachée à ce chocolat (et ce malgré de nombreuses remarques de mon entourage quant à sa gustativité) qu'il part systématiquement en voyage avec moi, même le temps d'un weekend. Si le petit-déjeuner peut également comporter un verre de bon jus d'orange, alors je suis ravie. Et si en plus, il y a quelques tartines de bon pain avec du beurre salé et de la confiture de fraises pas trop sucrée (comment ça je suis difficile?) alors la journée s'annonce très bien. G. quant lui, a besoin d'un café très sucré et si la matinée ne s'annonce pas trop sédentaire et que le déjeuner sera tardif, il ne refusera pas un croissant bien feuilleté et fondant à la fois.
On savait déjà en se levant qu'on passerait la journée sur la plage de Brighton. Les affaires sont déjà prêtes dans le grand cabas à fleurs, il ne reste plus qu'à mettre dans un panier le pique-nique joliment empaqueté qui attend au réfrigérateur.
Dans la voiture qui roule tranquillement vers la mer, on écoutera Nouvelle Vague et Astrud Gilberto. G. évoquera des vacances anciennes et nous nous rappellerons par exemple le goût du poisson grillé sur la plage de Mirissa.
Sur celle de Brighton, il y aura peu de monde. Avant d'étaler les serviettes, on marche un peu le long de la mer, s'étonnant de ses reflets gris-verts. On hésite à ôter les sandales pour goûter l'eau mais on se raisonnera en se disant qu'il y a toute la journée pour cela. Il ne fait pas vraiment chaud mais on aura prévu un petit pull doux et léger. On surprend un crabe minuscule s'enfuir à toute allure entre des rochers.
Sur les serviettes, on commence d'abord par rêver un peu. Et puis je feuillette des magazines féminins, j'observe les pages mode et je montre à G. ce qui sera tendance l'hiver prochain. Il commente les imprimés, les modèles, les similitudes avec les collections d'il y a deux ans.
Bientôt viendront s'installer non loin de nous une maman et ses deux petites filles, étrangement sages, qui commencent tranquillement à faire des pâtés.
Et puis il sera midi, on se surprend à enlever le petit pull. Du panier en osier, on sortira par exemple une petite salade de poulet à la mangue et à l'ananas, comme celle suggérée par Estérelle pour ses Brunchs branchés, et puis des petits sandwiches et du clafoutis aux pêches. On observe les quelques voiles blanches qui passent au loin et on parle de gens croisés et qui ne cessent de nous intriguer.
On lit aussi, allongés sur le ventre; par exemple pour ma part, Femmes et filles d'Elizabeth Gaskell, parfait quand on a lu tous les romans de Jane Austen et qu'on en veut encore. G. quant à lui, est plongé dans la biographie de Jacques Lacan où il apprend avec effroi que Jacques menait une double vie.
Et puis on voit les deux petites filles sages s'élancer avec enthousiasme vers la mer alors on se décide de la goûter nous aussi, mais ça n'est pas très important. Ceci dit, elle n'est pas mauvaise du tout.
On range les affaires dans le grand cabas fleuri, on enroule les serviettes sur elles-mêmes, on sourit et on se dit que rentrés à la maison, pour le goûter, on ferait bien des scones au citron et aux fraises séchées.
Je me souviens avoir lu la recette dans le livre consacré au citron des Editions de l'Epure, oui, dans la collection qui propose dix façon de cuisiner un produit. Parfois imités, très loin d'être égalés. Ces livres n'ont que des qualités, ils sont jolis et bien écrits, les recettes font parfois sourire et souvent se resservir. J'aime bien aussi en envoyer pour les anniversaires d'amies qui sont loin: celui sur les glaces pour E. qui venait d'acheter une sorbetière, celui sur le pesto pour L. qui adore les pâtes et l'huile d'olive...
Dans la recette originale, il s'agit de scones au citron et aux myrtilles séchées mais j'avais des fraises séchées dans le placard et le mariage me paraissait plaisant. J'ai suivi les instructions à la lettre mais ça a été un échec total. Quand j'ai achevé la pâte, je la trouvais bien trop crémeuse pour une pâte à scones mais, je ne sais si c'est par paresse ou par optimisme aveugle, je n'ai pas chercher à améliorer les choses tant qu'il en était encore temps (d'autant que G. avait goûté la pâte à cru et l'avait trouvée délicieuse). Ainsi, j'obtins d'abord deux grands sablés dorés, très bons et délicieusement parfumés au demeurant. Puis sur une suggestion de G., je verse le reste de pâte dans un moule à muffins et j'obtiens un petit cake, aérien et moelleux, au bon goût de citron. Ouf, le goûter était sauvé mais je ne m'avoue pas vaincue: je veux des scones maison!!!

Les scones au citron et aux fraises séchées inspirés d' Elisabeth de Nederlanden
J'avais divisé les proportions par deux, ouf
-2 cuillères à soupe de zeste de citron râpé
-3 cuillères à soupe de jus de citron
-400g de farine
-120g de sucre en poudre
-2 cuillères à café de levure chimique
-120g de beurre froid en petits morceaux
-100g de fraises séchées
-50ml de crème liquide
-50ml de lait (j'ai mis du lait ribot, c'est quand même pas à cause de ça?)
-100g de mascarpone

Mélanger la farine, le sucre, la levure et les zestes.
Ajouter le beurre et mélanger du bout des doigts pour obtenir un mélange grumeleux.
Ajouter les produits laitiers, deux cuillères à soupe de jus de citron et les fraises. Mélanger.Etaler la pâte et découper des cercles (cette étape m'a été impossible, c'est là que la pâte était délicieusement et désespérément crémeuse).
Napper avec le reste de jus de citron et saupoudrer de sucre avant d'enfourner à 200° pendant 25 minutes.