mardi 31 octobre 2006

Moment d'étrangeté au supermarché et crumble aux prunes dorées

Pour remplir le garde-manger, il y a bien entendu le marché du samedi matin. Les étals colorés, les parfums (des fleurs, des herbes fraîches, du pain, des poulets qui rôtissent...), le plaisir d'échanger un mot avec les producteurs, celui d'être reconnu par certains et l'accès à quelques privilèges (quelques pommes en plus, un petit morceau de terrine), font tout le charme de cette promenade gourmande. Samedi dernier, j'étais toute contente de rentrer avec une butternut et puis des tomates cerises sucrées comme des bonbons, de beaux poireaux, un chou-fleur de Saint-Malo que j'achète toujours à un monsieur qui a quoiqu'il arrive la moustache qui sourit, des yaourts, de la crème crue, des oignons rouges, des carottes et des pommes de terre de l'île de Batz, des cox oranges et des reines des reinettes, de la terrine à l'ananas et au gingembre (parfois on surprend la dame qui en vend s'en faire une petite tartine et la déguster avec les yeux qui pétillent: quelle auto-promo!)... Et sur le chemin du retour, nous étions trop chargés pour jeter un oeil aux bouquinistes de la place Sainte-Anne (où il y a très souvent des trésors: j'y ai trouvé en parfait état Les mystères du château d'Udolphe de Ann Radcliffe, chez José Corti, avec une superbe couverture) mais nous avons fait un détour par la boulangerie Hoche d'où nous sommes ressortis avec un pain de Modane qui n'a pas fait long feu (c'est une brioche allongée avec une petite couche de crème d'amandes et des écorces d'oranges confites).

Pour complèter le marché, il nous arrive d'aller au Monop où j'aime beaucoup flâner dans les rayons de cuisine du monde et ceux d' épicerie fine. Ce n'est pas le Bon Marché, mais il y a des petites choses très intéressantes (et appétissantes!).
Samedi soir, il était déjà fort tard quand je faisais la queue à la caisse. La dame qui me précédait, une grande brune très soignée, maquillée, en jean slim noir, seule, me regarde déposer du lait ribot, de la poudre d'amandes, du parmesan, de la mozzarella di buffala, du cacao, des piments antillais et des petites prunes à la peau rouge doré qui m'ont fait de l'oeil et que j'imaginais alors très bien en crumble pour le dessert. G. était parti chercher euh... je ne sais pas si je peux l'avouer, j'ai l'impression que les produits industriels n'ont pas très bonne presse sur les blogs de cuisine, pourtant il m'en arrive d'en acheter, il y a de très bonne choses et je n'arrive pas à tout faire moi-même (la pâte feuilletée, le pain, les yaourts, certains biscuits...), bon, il s'agissait de Krisprolls, je n'y peux rien, j'adore ça avec du beurre demi-sel et de la confiture de fraises!
Quand il revient, G. me dit: "Oh tu sais, au rayon Italie, il y a des Pavesini!" Je n'en reviens pas, même si j'aime bien les acheter à la petite épicerie italienne, je trouve ça plus pratique de les trouver à Monop, ouvert tous les jours de la semaine et jusqu'à vingt heures. Je suis d'autant plus contente quand G. m'informe de leur prix. Et puis je tempère mon enthousiasme: "Mais est-ce qu'on en a besoin tout de suite? On vient d'en faire, du tiramisu..." Ce à quoi G. répond avec gourmandise:"C'est pas grave, comme ça on en aura. Et moi je veux bien en remanger du tiramisu..." Je l'abandonne donc momentanément à la caisse et me dirige vers les Pavesini (je n'aime pas trop privilégier les grandes enseignes aux petites boutiques, mais bon, je continuerai à acheter des pizzas et des pâtes à la petite épicerie italienne...). Quand je reviens, la dame brune en noir qui nous précédait s'éloigne de la caisse et G. me raconte cette chose incroyable, incongrue et triste. Comme j'allais chercher les Pavesini elle lui a dit: "Je peux vous dire quelque chose? Je trouve ça bien la manière dont vous parlez à votre amie. Je n'ai pas l'habitude de voir des gens se parler comme ça, on sent que vous faites attention à elle".

Le crumble aux prunes dorées toujours pour le même petit moule de 11,5cm de diamètre et 4cm de hauteur, parfait pour 2
3 prunes coupées en morceaux, trois noix de beurre, un voile de sucre roux
40g de farine T65
40g de beurre demi-sel bien froid, en petits morceaux
15g de poudre d'amandes
30g de sucre roux

Mélanger la farine, la poudre d'amandes et le sucre.
Ajouter le beurre et mélanger du bout des doigts pour obtenir un sable grossier.
Placer au frais pendant que vous poêlez les prunes une dizaine de minutes avec un peu de beurre salé et du sucre roux, les fruits doivent être tendres et enrobés d'un beau caramel doré.
Répartir les fruits dans un plat, les recouvrir de la pâte à crumble.
Faire cuire une demie-heure à 180°.

Avec une cuillère de crème fraîche...miam!

samedi 28 octobre 2006

Variations sur un clafoutis

Hier il y avait à nouveau un petit colis soigneusement emmailloté dans la boîte aux lettres: c'était vraiment un joli paquet, avec du papier kraft, des liens en raphia et l'adresse, calligraphiée avec application. Il était destiné à G., qui a brillamment soutenu sa thèse lundi dernier, et provenait de J., sa grand-mère. A l'intérieur de la boîte (destinée en réalité à contenir des chaussures et dont le design était délicieusement rétro), nous avons découvert du foie gras, des cous de canard farcis au foie gras et du confit de canard que l'on est autorisé à manger de bon coeur, convaincu par Anaïk que le confit, c'est pas gras.
J. et son mari habitent tous deux dans une petite ville du Sud-Ouest, non loin de Duras. De mi-juin à mi-septembre, ils migrent dans leur belle maison des Charentes, à deux pas de l'Océan. C'est là-bàs que j'ai fait leur connaissance pour la première fois. J. est octogénaire mais elle continue d'aller au marché à bicyclette, elle connaît le poissonnier qui aura les moules les plus charnues, les langoustines les plus dodues, et le boucher qui vend l'agneau le plus fondant, le veau le plus goûteux, et le maraîcher aux fraises goûteuses qui ne manque pas de lui offrir un bouquet de persil. J. sait que le secret des excellentes cuisinières, celles qui savent réjouir ceux qu'elles aiment, réside avant tout dans l'organisation: il faut la voir s'activer en cuisine, avec précision, sans tout mettre sans dessus-dessous.
J'ai un souvenir imperissable de certains plats très simples mais absolument déconcertants par leur saveur: dès la première bouchée, on est conquis et l'on se dit que la cuisine, partout, devrait avoir ce goût-là. Je me souviens en particulier de ses tomates farcies, petites mais bien replètes, en rang serré dans le plat, la farce est parfumée et a ce goût si rassurant de lard, d'oignons, de persil, je ne sais, tout ce qui fait la cuisine des grands-mères. J. fait aussi divinement bien les crêpes: lorqu'une crêpe est prête, elle la dépose dans une assiette et R. s'empresse de la saupoudrer de sucre avant de la rouler du bout des doigts (c'est si chaud!) en un cigare serré qui agrandit la petite pyramide de crêpes ainsi apprêtées et conservées au chaud sur une assiette reposant sur une casserole d'eau bouillante. Le sucre forme un sirop au coeur du cigare: quand on a commencé, on ne peut plus s'arrêter!
Je me souviens aussi du bonheur des petits-déjeuners, le chocolat fumant, les tartines, les viennoiseries, le parfum des fruits dans le compotier, et sa confiture de fraises, une sorte de compotée juste sucrée comme il faut, avec de beaux morceaux de fraise.
J. sait aussi apprécier la cuisine des autres et c'est un réel plaisir de la voir parcourir avec appétit les menus de restaurant et son regard est tout brillant quand le serveur soulève la petite cloche argentée, lui faisant découvrir un beau plat de poisson et de saint-jacques. Elle s'étonne parfois de certaines associations qui nous sont familières: "Tiens, ils servent du foie gras avec de la figue?" mais ne rechigne jamais à goûter même ce qui lui semble étrange.
J. fait un délicieux clafoutis aux cerises avec de grosses cerises noires, sucrées et acidulées à la fois. Elle m'avait envoyé la recette et j'adore le décliner avec les envies du moment: des figues fraîches, des pêches,des abricots, des bananes (en remplaçant le lait par du lait de coco... miam), substituer le lait par du lait ribot; c'est très pratique, très rapide à faire et toujours délicieux. La dernière fois, je l'ai fait aux pommes et mmmm, je n'ai pas été déçue!

Le clafoutis de J.
Les proportions sont pour 6 personnes, environ. Je divise souvent par 2 ou par 3.
150g de farine
150g de sucre roux
3 oeufs
2 verres de lait
10cl de crème fraîche
un peu de vanille liquide
un peu de beurre demi-sel
environ 10 pommes (c'était des toutes petites reines des reinettes) épluchées et coupées en petits morceaux

Fouetter le sucre et les oeufs.
Ajouter la farine, bien mélanger.
Ajouter le lait, puis la crème fraîche et la vanille.
Vous obtenez une sorte de pâte à crêpe un peu épaisse.
Beurrez un plat genre plat à gratin.
Répartir les pommes.
Verser la pâte.
Saupoudrer d'un voile de sucre roux.
Répartir des copeaux de beurre.
Enfourner environ une heure à 140° (le dessus doit être bien doré)

mercredi 25 octobre 2006

La volupté d'un samedi soir et autres révélations

Parfois la vie est terriblement douce et l'on voudrait qu'il en soit toujours ainsi. La sensation est d'autant plus agréable qu'elle tient à peu de choses. Il y a quelques temps, un employé de la Poste particulièrement souriant nous a livré un petit colis: G. avait commandé en secret les dvd des films d'Eugène Green tout récemment édités. Je les connaissais déjà, j'en avais gardé des images et des répliques très précises, et auxquelles il m'arrive de penser quand la vie me semble lourde.
Ce samedi-là, nous l'avions passé à travailler et le visionnage du film apparaissait comme une récompense. Il pleuvait et on se sentait particulièrement bien, à l'abri, dans l'appartement tout illuminé, au chaud. Avant de regarder le film, nous étions à la recherche d'une douceur à déguster après notre séance à domicile (quand E. était encore à Rennes, au début de nos études, nous avions l'habitude d'aller au cinéma puis d'aller manger une crêpe dessert -très souvent chocolat, glace vanille et chantilly- comme savent très bien le faire certaines crêperies rennaises) et, comme un peu plus tôt dans la soirée en parcourant quelques blogs, le gâteau Belle-vue de Christophe Felder s'était rappelé à moi (je l'ai fait une fois il y a longtemps et j'avais été bluffée par sa consistance mousseuse et voluptueuse), nous l'avons préparé avec G. avant de nous installer devant Le monde vivant. Il règnait alors dans l'appartement un délicieux parfum de gâteau au chocolat qui met déjà le coeur (et les papilles!) en fête.
Ce que raconte Le monde vivant: un ogre vit dans un beau bien qu'ascétique château avec une jolie épouse qui lui prépare avec dégoût mais par nécessité des enfants rôtis (n'hésitant pas à les congeler si l'ogre a la chasse heureuse). Mais cet ogre est amoureux d'une autre jeune fille, aux cheveux dorés et à la bouche cerise, or elle est enfermée dans une chapelle. Il y a aussi un chevalier au lion et un garçon plus ordinaire, qui a un bandeau rouge et une maman très prévoyante. On ne dirait pas comme cela mais c'est un film très sensuel: la femme de l'ogre rompt un pain qui s'ouvre sur une jolie mie et le partage avec les enfants, elle leur sert du lait chaud qui a l'air tout mousseux, le garçon au bandeau rouge fait la connaissance d'un arbre qui porte à ses lèvres de beaux grains de raisin bien juteux... C'est aussi un film qui parle du caractère sacré de la parole donnée et de l'innacceptabilité morale de rompre un serment. C'est très beau et très rassurant aussi parce qu'Eugène Green suggère que la parole permet d'accéder au désir, et particulièrement à celui auquel on se refuse de penser.


C'est dans cette atmosphère que nous avons dégusté le gâteau Belle-vue, qui sous sa croûte fine et craquante, révèle une délicieuse volupté chocolatée. Et le bruit de la cuillère qui découpe la bouchée est indescriptible, mais terriblement prometteur.
Je voulais remercier toutes les personnes qui laissent de si gentils commentaires sur ce blog. Cela me fait tout bizarre parce que je lis les blogs de cuisine depuis plus d'un an et demi (suite à un petit mot de Télérama -que je ne fréquente plus guère désormais- sur le site de Pascale Weeks) et vous m'êtes très familiers, j'ai suivi l'évolution de plusieurs blogs, toujours impressionnée par la réalisation de plats de plus en plus compliqués, originaux ou personnels. Du coup, je suis toute contente d'être lue par vous, que j'ai tant l'impression de connaître (et qui m'avez permis de renouveler gâteaux et petits plats!)

Le gâteau Belle-vue de Christophe Felder
Pour huit personnes:
4 oeufs dont vous séparez le blanc des jaunes
125g de sucre semoule (j'ai mis du sucre glace)
125g de chocolat à 62% de cacao
2 cuillères à soupe de lait
10 cL de crème fraîche
1 cuillère à soupe de farine
50g de poudre d'amandes
Battre les blancs en neige en incorporant le sucre à mi-parcours.
Faire fondre le chocolat avec le lait et la crème (je l'ai fait au bain-marie mais si vous maîtrisez votre micro-ondes, c'est parfait).
Attendre un peu que le mélange refroidisse et ajouter les jaunes un à un, puis la farine, enfin la poudre d'amandes.
Incorporer délicatement les blancs en neige.
Verser dans un moule chemisé de papier sulfurisé (ce gâteau est particulièrement fragile).
Faire cuire environ une demie-heure dans un four préchauffé à 180° (quand la croûte sur le dessus est uniforme: c'est prêt!)

vendredi 20 octobre 2006

Le secret d'un curry réussi, upside-down cake aux figues et interrogation sur le voisinage

J'ai très tôt participé à la préparation du curry avec ma maman. J'ai toujours eu la même tâche précise, un peu comme un rituel. Quand j'en avais encore besoin, elle installait un petit escabeau devant la gazinière et mon rôle consistait à ne jamais arrêter de remuer avec une grande cuillère en bois le riz mis à griller à sec à feu doux dans une large poêle à hauts bords. Comme ce riz avait préalablement été lavé, il formait à la phase initiale de petits tas qui finissaient par se rompre au fur et à mesure que les grains brunissaient. Il ne fallait jamais cesser de remuer, sous peine de voir les grains brûler. Une fois qu'ils étaient tous uniformément bronzés, ma maman les réduisait en poudre dans un petit moulin à café electrique.
Alors que j'étais absorbée par ma tâche (oui, je me sentais investie d'une grande responsabilité), ma maman préparait le reste des épices qui composaient son curry: de la citronnelle, du curcuma, du galanga, de l'échalote, de l'ail, de l'écorce de cumbava... Elle les écrasait dans un mortier avec ma poudre de riz grillé. J'aimais beaucoup cette atmosphère parfumée, ces instants passés ensemble. Ma maman chantait ou me racontait des histoires, c'était très agréable.
Le curry en lui-même cuisait longtemps, il fallait du lait de coco bien sûr, et puis des patates douces, des oignons, des haricots verts, de l'aubergine, et une viande, selon l'envie, coupée en gros cubes, et qui serait infiniment fondante. C'est un plat terriblement réconfortant, onctueux, rassurant.
Lorsqu'avec G. nous décidons de faire un curry (et j'apprécie particulièrement cette décision le dimanche soir quand nous rentrons d'une longue ballade) je ne mets pas de riz à griller, nous utilisons des pâtes ou des poudres de curry déjà prêtes. C'est peut-être idiot puisqu'il y a la recette de ma maman, mais d'une manière générale, je suis toujours angoissée à l'idée de reproduire ses plats à elle; j'ai peur de la déception. Cependant, nos curry sont également délicieux et réconfortants (sauf lorsque je mets trop de pâte comme la dernière fois, et que celle-ci est composée pour moitié de piment rouge: nos palais n'avaient alors rien à envier au Vésuve en éruption) et celui que G. a préparé il y a quelques temps concurrençait très sérieusement ceux de ma maman. G. a obtenu ce résultat en utilisant l'ingrédient de la photo (n'est-ce pas qu'on dirait un petit pot de cosmétique?), le kapik. C'est une pâte de crevettes salées, séchées et fermentées, qui dégage une terrible odeur de pourriture rivalisant avec le durian, mais qui utilisée avec parcimonie donne un délicieux goût au curry. Je l'appelle avec affection "la pâte de crevettes pourrie qui pue", ma maman l'utilise aussi dans des sautés et elle leur confère réellement un petit goût très agréable.
Le soir où G. a inauguré notre petit pot de kapik, j'ai constaté avec horreur que notre réserve de riz était vide (enfin, il en restait pour un tiers de personne). Comme il est évidemment inconcevable de déguster un curry avec un autre accompagnement (mmm, c'est si bon le riz imprégné de sauce à la noix de coco épicée...), j'ai immédiatement chaussé mes tennis et je suis allée en chercher chez "la sorcière". Bien entendu, ce n'est pas une sorcière, c'est juste une épicière en bas de chez nous, dont le magasin reste un peu ouvert après la fermeture du Monop, qui se targue de vendre des produits de qualité (oserais-je dire "de luxe"?) et de haute valeur gustative mais qui, lorsqu'on lui demande si elle a du mascarpone, répond hébétée: "C'est quoi le mascarpone? Une sorte de fromage blanc?". Bref. En plus de tous ses défauts, elle n'avait plus de riz ce soir-là. J'étais désespérée, je ne voyais plus qu'une solution: les voisins.
J'avais déjà sollicité leur générosité un après-midi où il me manquait un oeuf pour la réalisation du crousti-passion de Mercotte. Ce jour-là, je n'avais pas du tout le temps de sortir, la livraison des courses ne devait avoir lieu que six heures plus tard, le crousti-passion devait impérativement être prêt pour le soir, il me fallait cet oeuf de toute urgence. Un des voisins (ce sont deux garçons en collocation, ils ont l'air très gentils, parfois il règne sur le palier de délicieuses odeurs de cuisine asiatique -l'un d'eux l'est- dont celle des nems!), mais nos timidités respectives font que nous n'en savons guère davantage sur eux. Je n'avais pas pu leur apporter du crousti-passion pour les remercier, c'était trop bon et il n'y en avait plus, alors cette fois-ci, pour le riz, j'ai voulu leur apporter un gâteau. J'ai décidé de faire un upside down cake aux figues inspirée de la recette d'Esterelle, j'avais déjà fait sa version aux abricots et c'était absolument délicieux (la petite croûte de caramel... miam!).
Celui aux figues était parfaitement réussi, avec une belle couronne dorée et caramélisée, je leur en ai découpé une jolie part et ils avaient l'air ravis. Le problème: cet épisode s'est passé il y a déjà un mois, ils ne nous ont pas rendu l'assiette et quand nous les croisons, ils ne font aucune allusion au gâteau. Que s'est-il passé?
-l'upside down est tombé sur le carrelage douteux de la cuisine et a fini à la poubelle
-ils l'ont trouvé infâme et me détestent
-ils l'ont trouvé divin, ne savent pas comment me remercier et attendent Noël pour m'offir mon poids en pâtisseries Sadaharu Aoki.
Je pourrais simplement leur poser la question (ne serait-ce que pour l'assiette), mais la timidité, que voulez-vous...


L'upside down cake aux figues
Pour un moule de 24 cm de diamètre
10 à 12 figues coupées en deux ou en quatre
Pour le caramel:
120g de beurre demi-sel
150g de cassonade
Pour le gâteau:
120g de beurre demi-sel bien mou
168g de sucre
1 cuillère à café de vanille liquide ou une gousse de vanille fendue et grattée
2 gros oeufs de poules qui sont libres de leurs mouvements
137g de farine
27g de poudre d'amandes
1 sachet de levure chimique
186g de lait ribot

Mettre les ingrédients du caramel dans le moule et laisser cuire à feu très doux sans y toucher, jusu'à obtenir un sable blond doré.
Répartir les figues coupées sur cet appétissant sirop.
Mélanger le beurre et le sucre puis ajouter la vanille sous la forme disponible.
Ajouter les oeufs un à un, en mélangeant bien entre chaque.
Dans un bol, mélanger la farine, la poudre d'amandes et la levure.
Ajouter ce mélange à la pâte en alternance avec le lait ribot.
La pâte est belle et lisse.
Verser la sur les figues et hop! au four préchauffé à 180° pendant 45 minutes (surveiller: c'est prêt quand c'est doré et qu'un cure-dents en ressort propre.)


Dessin extrait de Une cuisine grande comme un jardin

de Alain SERRES et Martin JARRIE

lundi 16 octobre 2006

Histoires de cheesecakes

Lorsque nous sommes arrivés à Londres, loin du typique fog de la capitale, il règnait un temps splendide, les lunettes de soleil étaient indispensables et aux terrasses, dans les parcs, partout, les Londoniens profitaient avec un plaisir évident de la douceur de cette fin d'été. Nous avons marché longtemps dans un certain état d'euphorie lié au début des vacances et à l'agrément d'être en terre étrangère. Arrivés dans Chelsea alors que l'après-midi était déjà bien entamée, nous avons cherché un endroit où déjeuner et nous nous sommes arrêtés dans un Prêt à manger.
Je ne le savais pas encore mais grâce au petit livret en libre-service sur le comptoir j'ai appris que les établissements de cette chaîne (il y a des Prêt disséminés dans tout Londres) se caractérisaient par la qualité et la provenance "éthique" des ingrédients qu'ils utilisent, ainsi que par diverses positions "politiques" (les employés n'y sont pas exploités comme dans d'autres fast-foods, les invendus de la journée sont donnés à des organisations humanitaires, les emballages sont le plus biodégradables possible, les véhicules de livraison sont électriques). Ainsi les produits utilisés sont autant que possible issus de l'agriculture biologique, ils ne comportent aucun conservateur ou additif chimique et il y a un réel souci chez Prêt du "manger sain avec plaisir" (ils ont par exemple toute une gamme de smoothies délicieux -le mangue-banane, mmmm- qui permettent de faire le plein de vitamines, ils proposent des soupes et des boisons "détox"). Tout est très joliment présenté, notamment les petits cakes maison à la pomme, au citron, à la banane ou au chocolat, et les banquettes sont très agréables, on peut y rester à loisir à regarder les passants derrière la vitre. Les sandwiches sont particulièrement savoureux, que ce soit le all-day breakfast ou le Hoisin duck wrap et chaque semaine, il y a le Special of the week dans son emballage noir (d'ailleurs, sur les emballages, il y a souvent des recettes de cuisine, je me souviens de celle des croissants et des chips de légumes) . Les salades sont bien fraîches et bien assaisonnées, celle aux écrevisses, à l'avocat et à la roquette était un vrai délice. Les desserts ne sont pas en reste: nous avons goûté chez Prêt deux cheesecakes qui sont vraiment une réussite pour des gâteaux industriels. Le premier était un Caramel crunch cheesecake avec une crème merveilleusement onctueuse et des éclat de caramel et un Lemon cheesecake tout ce qu'il y a de plus classique mais, une fois encore, la texture de la crème était un pur bonheur régressif. Tout cela est vendu à des prix fort abordables, ce qui est appréciable dans une ville aussi chère que Londres. Je me demande comment ce concept ne s'est pas encore exporté en France.


Comme il faut savoir varier les plaisirs, nous ne pouvions pas déjeuner chaque jour dans un Prêt et mon autre cheesecake britannique, je l'ai dégusté dans une ambiance bien différente, chez Muffin man. C'est un joli salon de thé avec terrasse dans une rue calme de Kensington. Les serveuses portent toutes le même tablier vert sur la petite jupe noire, elles sont chaleureuses et souriantes. Il y a à la carte toutes les douceurs anglo-saxonnes dont la simple évocation fait déjà saliver (enfin, pour ma part): les scones avec la clotted cream et la confiture de fraises, les crumpets, les cucumber sandwiches, le typical breakfast... Nous avons déjeuné de délicieux petits sandwiches chauds agrémentés d'une salade de crudités et de graines germées. La gentille serveuse nous a apporté une énorme théière de Lapsang Soochong et en dessert, il y avait donc cette jolie part de cheesecake aux myrtilles. Ce n'était pas la version "fond de biscuits écrasés", c'était plutôt une sorte de tarte au fromage blanc renfermant de savoureuses myrtilles.
J'aime bien faire des cheesecakes, je trouve ça très ludique d'écraser les biscuits, de réfléchir à de nouvelles recettes, d'essayer divers produits laitiers (voire d'en écouler qui sont un peu périmés...) et j'adore le contraste entre le biscuit croquant et la crème onctueuse.
La recette qui suit est une recette classique de cheesecake à la banane mais pour le rendre plus gourmand, je l'ai recouvert d'une ganache au chocolat qui refroidie, donne une consistance supplémentaire très agréable à la crème.

Le cheesecake à la banane et au chocolat
les proportions sont toujours pour un petit moule à charnière de 11,5 cm de diamètre et 4 cm de hauteur
Pour le fond:
-6 speculoos
-2 Sprits
-20g de beurre
Pour la crème:
-un petit pot de faisselle
-une grosse cuillère à soupe de crème fraîche
-100g de fromage blanc à 20%
-un oeuf
-20g de sucre
-une banane écrasée avec un peu de jus de citron
Pour la ganache:
-40g de chocolat à pâtisser
-2 cuillères à soupe de crème fraîche

Ecraser les biscuits.
Les mélanger au beurre fondu.
Les verser dans le moule, tasser un peu et faire cuire à 200° environ dix minutes (les bords doivent être à peine dorés. Laisser si vous le pouvez, un petit temps au réfrigérateur.
Mélanger tous les fromages, la crème; ajouter l'oeuf, le sucre puis la banane, homogénéiser.
Verser la crème sur le fond biscuité, enfourner: 10 minutes à 180° puis environ 40 minutes à 100° (j'ai un four à gaz un peu capricieux et sans thermostat, en général, j'arrête la cuisson quand les bords sont dorés et le centre juste un peu tremblotant).
Laisser refroidir avant de réfrigérer une nuit si possible.
Une heure avant dégustation, couper le chocolat en petits morceaux, faire bouillir la crème, la verser sur le chocolat, remuer délicatement et verser sur le cheesecake. Remettre au réfrigérateur jusqu'à l'heure du dessert.


Prêt à manger: un peu partout dans Londres.
The muffin Man: 12 Wrights Lane, W8. 0207-937-66-52. M° High Street Kensington.

vendredi 13 octobre 2006

Tomatoumi et cochon mariné au miso en pensant à Venise et Saint-Affrique

J'aime beaucoup les petits livres de cuisine des éditions de l'Epure: le relief et la couleur des couvertures, toujours en adéquation avec le sujet -le joli jaune du citron, le vert franc de l'avocat, le violet profond de la figue...-, les recettes et la préface toujours délicieusement écrites et puis les pages à découper, étape pour laquelle j'opère toujours religieusement, toute contente de m'apprêter à lire un livre que nul autre n'a encore ouvert.
Dans celui sur le gingembre, on trouve la recette de la sauce rougail tomate, indissociable du rougail saucisses réunionnais; j'ai un peu modifié la recette pour en faire une sorte de tartare de tomates épicé, très frais et très agréable avec une viande ou un poisson grillé (j'en ai même recyclé un petit reste dans des pâtes, en rajoutant un peu de sucre et du parmesan, c'était très bon).

Le tomatoumi
En accompagnement, pour deux personnes:

-3 tomates en tout petits morceaux
-un pouce de gingembre également en tout petits morceaux
-de la cive émincée ou une échalote rose émincée mais avec de jeunes oignons, ça marche aussi
-un piment rouge coupé fin
-le jus d'un demi citron vert
-une pincée de sucre
-un peu de sel

C'est très simple: il suffit de mélanger le tout et de rectifier l'assaisonnement a posteriori.
Cette fois-ci, il restait quelques feuilles de basilic, alors hop! dans le tomatoumi!
Mettre au frais au moins une heure avant de servir.

Pendant longtemps, je ne pouvais imaginer le miso autrement que dans la soupe servie en entrée dans moult restaurants japonais, la meilleure jusqu'ici étant celle dégustée par G. dans un restaurant vénitien (dont je n'ai malheureusement ni le nom, ni la localisation), tandis qu'au-dehors il neigeait doucement. Nous avons eu de nombreuses déconvenues gustatives à Venise, dont des cannelloni aux épinards absolument infects, mais aussi plusieurs délicieuses surprises: du fenouil rôti puis gratiné au pecorino avec de l'agneau terriblement fondant dans un charmant restaurant (La Zucca), des petits sandwiches aux légumes grillés et au fromage dans une échoppe à côté du musée Guggenheim, un chocolat chaud terriblement crémeux et des petits fours à se damner dans un salon de thé à côté du Rialto (c'était sur le chemin de l'hôtel, c'est rapidement devenue une halte obligée), et puis ce fameux restaurant japonais. Je ne me souviens pas précisément de la déco, je revois juste une ambiance très feutrée, avec des petits salons particuliers, une lumière rouge, un mobilier sombre. Les sushis étaient absolument délicieux en plus d'être variés et esthétiquement parfaits. C'est un souvenir très doux, ce dîner japonais au coeur de Venise, alors qu'il neige au-dehors.

Quand je pense au miso, je revois aussi le pot découvert dans le réfrigérateur de Gé, la meilleure amie de G. (mon amoureux). Gé habite une maison toute en hauteur dans le centre de Saint-Affrique, près du vieux pont. Si elle était un personnage de Roger Hargreaves, ce serait une petite dame avec de belles boucles rousses, des tâches de rousseur et des lunettes violettes. Elle pourrait s'appeler Mrs Bio car chez elle, même le dentifrice est biologique! Elle adore les plantes et aime à fabriquer des sirops qu'elle rêve de vendre et qu'elle nous envoie parfois par la Poste (récemment, dans une grande boîte, G. a découvert du sirop de sureau et de sapin).
Gé nous avait gentiment accueillis pendant quelques jours cet hiver, il y avait encore des plaques de neige dans le creux des chemins, elle nous avait fait goûter un gâteau au chocolat et aux épices, du tempeh à la crème et aux champignons, de la compote de coings, du pain tout chaud à la farine de maïs, du sirop de framboise, du fromage blanc à la verveine... C'est chez Gé que j'ai vu pour la première fois du miso sous une autre forme qu'en soupe.
Le miso est donc une pâte de soja fermenté, dont la couleur varie du jaune pâle au brun foncé, et dont la qualité est aussi proportionnelle à la durée de la fermentation. Il comporte selon les variétés du riz ou de l'orge. Il se trouve très facilement dans les épiceries biologiques et peut-être même dans les hypermarchés.

C'est G. qui s'est occupé de la marinade (oh! vous allez finir par croire qu'il n'y a que lui qui fait la cuisine!). Il est préférable de la préparer la veille. Elle confère à la viande un moelleux incomparable et un goût délicieux.

Le cochon mariné au miso de G.

-2 côtes de cochon de votre boucher préféré
-2 cuillères soupe de miso (le mien est au riz)
-1 cuillère à soupe et demie de sirop d'érable
-1 cuillère à soupe et demie de sauce soja
-1 cuillère à soupe et demie de Mitsukan (du vinaigre de riz japonais)
-2 gousses d'ail pressé
-1 pouce de gingembre pressé


Comme pour le tomatoumi, vous mélangez le tout, vous laissez mariner une nuit et le lendemain, vous saisissez le cochon dans une poêle bien chaude avec un filet d'huile d'olive puis vous terminez la cuisson après avoir rajouté la marinade. Miam.

mercredi 11 octobre 2006

Questionnaire insolite et les udon crevettes-piment d'Espelette de G.


Dimanche, en fin d'après-midi, nous sommes allés marcher dans la forêt de Brocéliande, à La chambre aux loups, une partie très dense de la forêt, riche d'un lac et d'une alternance de sentiers boisés et de chemins escarpés et rocheux. De-ci, de-là, plusieurs ammanites tue-mouche, et puis aussi des châtaignes, des libellules et partout le parfum de la forêt en automne.
Lorsque nous sommes rentrés, la nuit était tombée, nous n'avions pas envie de passer trop de temps à cuisiner mais il était hors de question de nous contenter de médiocrité. G. a ainsi improvisé un petit plat riche en couleurs et en goût absolument dépaysant et qui nous a bien rechauffé de par son intensité en piment (je n'ai sans doute rien mangé d'aussi épicé depuis un mémorable green chili pork à Négombo ou le stir fried lamb with chili sauce au HK dinner de Londres). Si vous voulez préservez vos palais, vous pouvez ne mettre qu'un demi piment et surtout, pensez à en retirer les graines.

Les udon crevettes-piment d'Espelette de G.
Pour 2 personnes:
une quinzaine de crevettes cuites et décortiquées
100g de lardons poêlés et essuyés
1 courgette coupée en demies rondelles
1 oignon rouge émincé
un gros pouce de gingembre passé au presse-ail
une gousse d'ail qui aurait subi le même sort
un piment d'Espelette émincé
1 cuillère à soupe de sirop d'érable
2+1 cuillères soupe de sauce Maggi
des udons (des nouilles japonaises qui ressemblent un peu à des spaghetti)

Faire revenir la courgette, l'oignon l'ail et le gingembre dans un peu d'huile d'olive.
Quand la courgette est presque cuite, ajouter le piment, le sirop d'érable et les deux cuillères à soupe de sauce Maggi.
Ajouter les crevettes, elles sont déjà cuites, il n'est pas utile de trop insister, il faut juste qu'elles s'imprègnent de la sauce.
Pendant ce temps, les pâtes auront eu le temps de cuire.
Ajouter les pâtes à la préparation.
Verser la dernière cuillère à soupe de sauce Maggi. Encore une minute sur le feu et vous pouvez servir.


L'adorable AnneE de Station Gourmande, qui cuisine aussi bien qu'elle prend de jolies photos, m'a gentiment transmis le questionnaire du moment, je m'y plie avec plaisir.

Attrapez le livre le plus proche, allez à la page 18 et écrivez la quatrième ligne.
"Une fois, j'avais demandé praliné. Il trouvait ce parfum dégoûtant." C'est dans L'agrume de Valérie Mréjen, aux Editions Allia.

Sans vérifier, devinez quelle heure il est.
18h30

Vérifiez.
18h42.

Que portez-vous?
Une jupe rose et une tunique blanche.

Avant de répondre à ce questionnaire, que regardiez-vous?
G.

Quel bruit entendez-vous à part celui de l'ordinateur?
La badoit rouge que je viens de verser et qui fait "fizzz".

Quand êtes-vous sortie la dernière la dernière fois, qu'avez vous fait?
Je suis allée m'allonger sur un divan Le corbusier LC4 vers 17 heures 45.

Avez-vous rêvé cette nuit?
Ah oui!

Quand avez-vous ri la dernière fois?
Quand j'ai voulu changer le nom de ce blog et que G. a suggéré: Patoumi et Jacques Lacan.

Qu'y-a-y-il sur les murs de la pièce où vous êtes?
Des affiches, des photos: Marguerite Duras fume une clope avec Jeanne Moreau, Eric Rohmer saute à la corde, Jean-Louis Trintignant et Fanny Ardant réfléchissent devant l'océan, Françoise Sagan est au volant d'une voiture de luxe, Jeanne Balibar s'échappe par un vélux, Louis Garrel et Clotilde Hesme se tiennent par la main.

Si vous deveniez millionnaire dans la nuit, quelle est la première chose que vous achèteriez?
Des billets d'avion.

Quel est le dernier film que vous ayez vu?
Les amitiés maléfiques d'Emmanuel Bourdieu.

Avez-vous vu quelque chose d'étrange aujourd'hui?
A vrai dire, et c'est un peu triste: non.

Dites-nous quelque chose de vous que nous ne savons pas encore.
J'aurais voulu être Marcel Proust.

Quel serait le prénom de votre enfant si c'était une fille?
Didascalie.

Et si c'était un garçon?
Synopsis.

Avez-vous déjà pensé à vivre à l'étranger?
J'y suis déjà.

Que voudriez-vous que Dieu vous dise lorsque vous franchirez les portes du Paradis?
"Patoumi, faites-moi un cheesecake s'il-vous-plaît."

Si vous pouviez changer quelque chose dans le monde en dehors de la politique et de la culpabilité, que changeriez-vous?
Au restaurant, les plats chauds servis dans des assiettes froides.

Aimez-vous danser?
Non, mais j'aimerais bien.

Georges Bush?
Le vide.

Quelle est la dernière chose que vous ayez regardé à la télévision?
Comment je me suis disputé...ma vie sexuelle d'Arnaud Desplechin, en cassette, pour la cinquième fois.

samedi 7 octobre 2006

L'hiver dernier à Andernos ou comment une saucisse peut vous faire changer d'avis


Les gens qui n'aiment pas les huîtres ont plusieurs arguments à leur actif:
-ça ressemble à de la morve
-c'est vivant
-comme c'est vivant, ça peut remonter tout seul le long de ton oesophage et ça te ressort par les narines (oui, certaines personnes ont une imagination très productive)
-c'est gluant
-c'est mou
Ou plus simplement:
-c'est pas bon.
Il y a quelques temps encore, je pensais aussi que je ne mangerais d' huîtres qu'en cas d'absolue nécessité, par exemple si cela devenait l'une des épreuves de l'internat, ou plus simplement, pour ne pas déplaire à mes beaux-parents un soir de réveillon, comme Vincent Delerm.
Mais si nous en avons acheté une douzaine ce matin au marché (le gentil marchand nous en a donné treize, j'adore ce genre d'attention), c'est que depuis, j'ai changé d'avis.

Un dimanche de février, pendant des vacances bien méritées, la maman de G. avait décidé de nous emmener déjeuner à Andernos, sur le bassin d'Arcachon.
Il y avait un pâle soleil d'hiver et la route était belle.
Il faisait étrangement doux quand nous sommes arrivés sur le port, ainsi avons nous pu rester en terrasse, et même ôter nos manteaux. Je me souviens très bien des échassiers qui fendaient lentement le ciel et la mer un peu plus bas avait de subtils éclats verts.
Ils ont commandé avec beaucoup d'enthousiame un plateau d'huîtres à partager et j'ai un peu paniqué, j'ai d'emblée précisé: "euh oui oui j'aime bien ça... mais je n'en mange toujours qu'une ou deux, après ça m'écoeure."
Nous avons parlé de pot-au-feu et de pâte feuilletée puis le serveur a apporté les huîtres, joliment disposées sur leur lit d'algues et glace pilée, et, sur une petite assiette, des saucisses grillées. Ah oui, c'est vrai, ils m'avaient expliqué que cela se faisait beaucoup par ici, le mariage de la saucisse et de l'huître. J'ai jeté un oeil sur les fameux mollusques, j'ai eu l'impression que l'une d'entre elles me regardait. Gloups.
Ils ont commencé à se régaler et m'ont gentiment invité à en profiter, moi aussi. Tachycardisant à mort, j'en ai saisi une et hop, dans ma petite bouche l'huître qui deux secondes auparavant me dévisageait.
Tiens, c'est très agréable cette fraîcheur contre mon palais, il se diffuse dans ma cavité buccale un doux goût d'océan, c'est un peu l'effet pastille La vosgienne: vous en sucez une et vous vous retrouvez en pleine montagne. Ceci dit, ce n'est pas tout à fait la plénitude gustative. C'est là qu'intervient la saucisse. Jamais je n'aurais pensé qu'elle aurait eu un si grand rôle à jouer. Ce petit morceau de saucisse grillée, chaude, au discret goût poivré, salée comme il faut, un peu gras, charnu sous la dent, par un mystérieux processus chimique, me redonne immédiatement envie d'une autre huître.
Ainsi, ce midi, tandis que G. ouvrait avec une étonnante dextérité et un couteau pas du tout adapté, les premières huîtres de sa vie, je faisais doucement rissoler des saucisses au cochon des montagnes et nous nous sommes régalés.

jeudi 5 octobre 2006

De l'absolue nécessité des muffins

Parfois, lorsque vous êtes concentré depuis plusieurs heures sur un sujet qui suscite chez vous peu d'intérêt mais qu'il faut pourtant que vous maîtrisiez (exemple personnel: les accidents vasculaires cérébraux), vous commencez par regarder par la fenêtre (et vous savez même ce que j'y vois), vous avez envie de feuilleter Ma little Italy de Laura Zavan, vous écouteriez bien une chanson de Keren Ann, vous aimeriez boire votre cinquième tasse de thé vert mais vous avez un peu la flemme d'aller le préparer (surtout que vous l'avez déjà fait quatre fois), vous observez la pile de romans que vous avez lus depuis le début de l'année et vous vous dites: "Quand même la scène du bal dans Anna Karénine, elle est trop chouette", par extension, vous repensez à des films et vous revoyez Marie-Antoinette déguster de merveilleux macarons multicolores et là vous vous dites: "Faut que je fasse un gâteau, là maintenant".
Vous ouvrez placards et frigo, vous vous dites qu'il ne faut pas que ça prenne trop de temps (je crois avoir déjà évoqué mon sentiment de culpabilité...) et vous décidez de faire... des muffins (en plus ça ira bien avec la cinquième tasse de thé).
Des muffins oui, mais à quoi?
A la marmelade d'orange et aux pépites de chocolat, parce que vous aimez bien ce couple-là depuis Nigella.
Et puis à la crème de marrons, parce que vous savez que votre recette est pour trois muffins, qu'un petit à la crème de marrons ce sera bon tout en utilisant juste un petit pot de Clément Faugier.
Comme il vous reste aussi un peu de lait ribot (un rescapé du gâteau au coca cola et au chocolat de Nigella: un gros échec, je suis loin d'être une domestic goddess), vous décidez qu'il sera aussi de la partie.


Les muffins d'un après-midi jusqu'ici studieux:
Pour la pâte commune: je ne suis pas très moderne, je n'ai pas de moules à muffins en flexitruc, je les fais dans des moules indivduels anti-adhésifs de la taille d'un gros ramequin, la recette permet d'en faire trois)
125g de farine T65, mais n'importe quelle autre ira très bien
20g de sucre roux
un demi sachet de levure
100g de lait ribot
1 oeuf
35g de beurre fondu

Mélanger tous les ingrédients secs d'une part, tous les ingrédients liquides de l'autre puis faites se rejoindre les deux mixtures sans trop amalgamer, vous allez remélanger en rajoutant les autres ingrédients qui seront:

Pour les muffins à la marmelade d'oranges et aux pépites de chocolat:
2 grosses cuillères à soupe de marmelade
50g de chocolat concassé au couteau

Pour les muffins à la crème de marrons:
80g de crème de marrons


Ils cuisent en une vingtaine de minutes à 180°.

Après une première bouchée de celui à l'orange et au chocolat, G. a dit: "Mmmm, c'est le meilleur muffin que tu n'aies jamais fait". Ce garçon est vraiment adorable.

lundi 2 octobre 2006

Ce que l'on voit d'ici


Quel n'a pas été mon ravissement d'apprendre que madame Papilles accorde un délai supplémentaire aux retardataires, indécis et autres victimes du mauvais temps! Je fais partie des trois catégories et pour pallier le dernier défaut, j'ai choisi une photo de nuit et comme ça, vous pouvez admirer le bâtiment de la Poste de Rennes (puisqu'il s'agit de cela) comme nous le voyons du balcon au moment de nous coucher.

Mais quand je suis dans mon bureau, quand je travaille, quand je lis, j'écris, je rêve, j'écoute de la musique, je feuillette des magazines, je trie des vieux papiers, j'ouvre mon courrier et qu'il m'arrive de jeter un oeil à la fenêtre alors je vois s'emboîter les toits de tuiles surmontés de grosses cheminées en brique rouge et on distingue même, à l'arrière-plan, le joli dôme de la mairie.


dimanche 1 octobre 2006

Un joli samedi

Samedi après-midi, pendant que je peinais lamentablement au bureau, G. est allé faire une petite balade (j'aurais dû l'accompagner mais que voulez-vous, la culpabilité est un sentiment très -trop- pregnant chez moi) et il est revenu avec un petit cadeau extrêmement réconfortant: les deux tablettes de chocolat que vous voyez là-haut.
Celle de gauche est au chocolat noir et renferme une ganache aux citrons de Menton, celle de droite est au lait et contient de la noix de coco râpée grillée. C'est un vrai bonheur grâce au subtil équilibre des saveurs. G. les a achetées chez Philippe Bouvier, un pâtissier-chocolatier qui semble être un passage obligé par ici pour tout bec sucré qui se respecte. Il fait toute une série de tablettes fourrées de ganache délicatement parfumée (caramel au beurre salé, pamplemousse-anis, ananas-vanille-poivre du sichuan...), des chocolats aux fruits et aux épices, et des macarons qui ne sont pas mal du tout (je n'ai jamais goûté ceux de Ladurée, j'avais trouvé ceux de Sadaharu Aoki vraiment délicieux, quant à ceux de Pierre Hermé, celui à la truffe blanche m'avait donné la nausée), parfum marron glacé, orange-cannelle ou framboise avec sa petite framboise fraîche dissimulée au coeur de la ganache.
La chocolaterie de Philippe Bouvier est située dans la rue de Nemours qui est essentiellement constituée de repaires de gourmands. Outre deux boulangeries, un traiteur haut de gamme et une épicerie fine, on y trouve deux endroits que j'aime beaucoup.
D'abord une petite échoppe italienne, Italie Gourmande. On ne peut pas la rater: il s'en échappe toujours une délicieuse odeur de pizza brûlante. On y trouve, entre autres, du provolone, du pecorino, de le fontina, du speck des Dolomites, de la saucisse piquante des Abruzzes, du Rostello terriblement gôuteux, des pâtes de Cecco de toutes les tailles et de toutes les formes, les Pavesini pour le tiramisu et puis des pizzas à tomber avec des ingrédients simples mais pleins de goûts! J'adore l'etna avec son chorizo bien pimenté.
Juste à côté, on trouve la boutique de M.Luco, très gentil fromager affineur, toujours prêt à vous renseigner sur l'origine des produits et à conseiller les fromages "du moment". Il y a de tout dans sa petite boutique: des Saint Marcellin de toute fraîcheur, du brocciu corse, du Saint Nectaire hmmm, indescriptible, de la tomme mi-vache mi-brebis, et puis une petite douceur, le coeur gourmand, un petit chèvre frais renfermant une délicieuse compotée de figues. Miam.
Samedi soir, nous sommes allés voir un très chouette film d'Emmanuel Bourdieu Les amitiés maléfiques qui devrait plaire à ceux qui aiment Desplechin, Eugène Green et Denis Podalydès. On ne voit pas passer les deux heures que dure le film, ça parle très bien de la nécessité d'anéantir l'idéal pour s'accomplir (surtout quand cet idéal n'a aucune consistance).
Après la séance, comme il était bien agréable de marcher dans la nuit, nous nous sommes baladés jusqu'à l'Arsouille, un restaurant que nous aimons beaucoup. C'est un bistrot avec des tables en bois patiné, des chaises d'écoliers, des suspensions globe en opaline des années cinquante, des affiches rétro, un patron très gentil qui peut vous parler pendant longtemps de l'origine géographique des vins biologiques qu'il propose et un chef prévenant qui ne propose jamais les mêmes plats. Pour nous ce soir-là:
-des pimentios farcis au crevettes grises et au basilic
-une caillette aux noix de cajou et aux pieds de mouton avec une purée de potimarron pour G.
-un parmentier de queue de boeuf avec une purée à la tomme fraîche (délicieux plat mais j'ai regretté quand j'ai goûté la caillette délicatement parfumée et la purée de potimarron de G.: ce plat était parfait!)
-un millefeuille au chocolat
Ahh... c'était bien...


Et ce matin au petit-déjeuner, avant de se remettre à travailler:

Italie Gourmande et la fromagerie Luco: toutes deux au 26 rue de Nemours, Rennes
L'Arsouille: 17 rue Paul Bert, Rennes 0299381110