mercredi 25 octobre 2006

La volupté d'un samedi soir et autres révélations

Parfois la vie est terriblement douce et l'on voudrait qu'il en soit toujours ainsi. La sensation est d'autant plus agréable qu'elle tient à peu de choses. Il y a quelques temps, un employé de la Poste particulièrement souriant nous a livré un petit colis: G. avait commandé en secret les dvd des films d'Eugène Green tout récemment édités. Je les connaissais déjà, j'en avais gardé des images et des répliques très précises, et auxquelles il m'arrive de penser quand la vie me semble lourde.
Ce samedi-là, nous l'avions passé à travailler et le visionnage du film apparaissait comme une récompense. Il pleuvait et on se sentait particulièrement bien, à l'abri, dans l'appartement tout illuminé, au chaud. Avant de regarder le film, nous étions à la recherche d'une douceur à déguster après notre séance à domicile (quand E. était encore à Rennes, au début de nos études, nous avions l'habitude d'aller au cinéma puis d'aller manger une crêpe dessert -très souvent chocolat, glace vanille et chantilly- comme savent très bien le faire certaines crêperies rennaises) et, comme un peu plus tôt dans la soirée en parcourant quelques blogs, le gâteau Belle-vue de Christophe Felder s'était rappelé à moi (je l'ai fait une fois il y a longtemps et j'avais été bluffée par sa consistance mousseuse et voluptueuse), nous l'avons préparé avec G. avant de nous installer devant Le monde vivant. Il règnait alors dans l'appartement un délicieux parfum de gâteau au chocolat qui met déjà le coeur (et les papilles!) en fête.
Ce que raconte Le monde vivant: un ogre vit dans un beau bien qu'ascétique château avec une jolie épouse qui lui prépare avec dégoût mais par nécessité des enfants rôtis (n'hésitant pas à les congeler si l'ogre a la chasse heureuse). Mais cet ogre est amoureux d'une autre jeune fille, aux cheveux dorés et à la bouche cerise, or elle est enfermée dans une chapelle. Il y a aussi un chevalier au lion et un garçon plus ordinaire, qui a un bandeau rouge et une maman très prévoyante. On ne dirait pas comme cela mais c'est un film très sensuel: la femme de l'ogre rompt un pain qui s'ouvre sur une jolie mie et le partage avec les enfants, elle leur sert du lait chaud qui a l'air tout mousseux, le garçon au bandeau rouge fait la connaissance d'un arbre qui porte à ses lèvres de beaux grains de raisin bien juteux... C'est aussi un film qui parle du caractère sacré de la parole donnée et de l'innacceptabilité morale de rompre un serment. C'est très beau et très rassurant aussi parce qu'Eugène Green suggère que la parole permet d'accéder au désir, et particulièrement à celui auquel on se refuse de penser.


C'est dans cette atmosphère que nous avons dégusté le gâteau Belle-vue, qui sous sa croûte fine et craquante, révèle une délicieuse volupté chocolatée. Et le bruit de la cuillère qui découpe la bouchée est indescriptible, mais terriblement prometteur.
Je voulais remercier toutes les personnes qui laissent de si gentils commentaires sur ce blog. Cela me fait tout bizarre parce que je lis les blogs de cuisine depuis plus d'un an et demi (suite à un petit mot de Télérama -que je ne fréquente plus guère désormais- sur le site de Pascale Weeks) et vous m'êtes très familiers, j'ai suivi l'évolution de plusieurs blogs, toujours impressionnée par la réalisation de plats de plus en plus compliqués, originaux ou personnels. Du coup, je suis toute contente d'être lue par vous, que j'ai tant l'impression de connaître (et qui m'avez permis de renouveler gâteaux et petits plats!)

Le gâteau Belle-vue de Christophe Felder
Pour huit personnes:
4 oeufs dont vous séparez le blanc des jaunes
125g de sucre semoule (j'ai mis du sucre glace)
125g de chocolat à 62% de cacao
2 cuillères à soupe de lait
10 cL de crème fraîche
1 cuillère à soupe de farine
50g de poudre d'amandes
Battre les blancs en neige en incorporant le sucre à mi-parcours.
Faire fondre le chocolat avec le lait et la crème (je l'ai fait au bain-marie mais si vous maîtrisez votre micro-ondes, c'est parfait).
Attendre un peu que le mélange refroidisse et ajouter les jaunes un à un, puis la farine, enfin la poudre d'amandes.
Incorporer délicatement les blancs en neige.
Verser dans un moule chemisé de papier sulfurisé (ce gâteau est particulièrement fragile).
Faire cuire environ une demie-heure dans un four préchauffé à 180° (quand la croûte sur le dessus est uniforme: c'est prêt!)

8 Comments:

Blogger patoumi said...

Oh Cathy, il n'y a aucune honte à ne pas connaître Eugène Green: c'est un réalisateur très discret et ses films ne passent toujours que dans peu de salles, c'est pour ça que j'en parle, pour qu'ils soient davantage vus.

25 octobre, 2006 14:01  
Blogger Tit' said...

je note ce gâteau là...

25 octobre, 2006 14:17  
Blogger Gracianne said...

Le gateau, je l'avais deja vu quelque part, mais pas le film, qui a l'air tout aussi delicieux. Tu as l'air d'aimer tout autant les mots que les desserts.

25 octobre, 2006 14:30  
Blogger Alhya said...

je ne connaissais pas non plus Eugène Green mais le belle vue, ça oui, et la volupté je suis pour, archi pour!

25 octobre, 2006 14:34  
Anonymous Anonyme said...

Je découvre ton site avec cet article, et je suis sous le charme.
Du gateau, bien sûr, mais aussi des mots et de l'ambiance. Merci pour ce joli moment.
Je crois que je vais adopter la soirée beau-film-bon-gateau ce week-end !

25 octobre, 2006 14:45  
Anonymous Anonyme said...

Ton gâteau me semble être aussi doux que ton récit de ce film ...

25 octobre, 2006 16:25  
Anonymous Anonyme said...

Dégusté dans un tel contexte, quel délice!

25 octobre, 2006 16:46  
Anonymous Anonyme said...

Le Bellevue, je connais, Eugène Green, non. Il va falloir, sur tes conseils combler cette lacune.

25 octobre, 2006 17:16  

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