
Le weekend dernier, pour ne pas sombrer dans les abimes d'angoisse apparus violemment suite à une très mauvaise nouvelle, nous avons fui vers la mer. Cela s'était déjà produit lors d'un
triste hiver, la nouvelle était moins grave mais peu de temps après son annonce, nous avions entassé trois pulls et deux jeans dans un sac, recouvert le tout de quelques livres et magazines et, l'écharpe autour du cou, nous avions foncé vers la mer, le temps de quelques jours. Nous avions dû écourter ce petit voyage, une mini tempête de neige nous ayant contraint à rentrer plus tôt que prévu. Je me souviens, nous étions allés dîner dans un
très joli restaurant coréen où la cuisinière, adorable avec son petit foulard sur la tête, a l'habitude de venir nous embrasser quand nous arrivons. Je prends souvent du
bibimbab: dans une petite cocotte ronde et profonde en fonte, des légumes fraîchement sautés au piment côtoient du riz frit creusé en petit puits destiné à recueillir un jaune d'oeuf. La cocotte est servie
brûlante, il s'agit de remuer le tout avec ses baguettes pour obtenir un mélange savoureux et réconfortant.
Samedi dernier nous avions envie de nous éloigner du téléphone, d'enterrer la tristesse, d'avoir le coeur en fête malgré tout, alors on a décidé de partir au bord de l'eau.
Après le rituel passage au marché ( des tomates de toutes les couleurs, une jolie botte de carottes, des aubergines lisses et rebondies, des petites courgettes bien fermes, un poivron bien dessiné, des petites fraises de jardin, de la crème, de la terrine de volaille aux poireaux...), nous avons rapidement plié bagages sans oublier de mettre
les maillots de bain dans une petite pochette jaune soleil pleine de promesses. Et dans un sac en papier des petits sandwiches et des serviettes colorées. C'est étrange la force qu'il faut déployer pour repousser de son esprit les mauvaises pensées, tant d'énergie pour quelque chose d'absolument immatériel. Je ne suis pas une grande sportive.
Sur la route il a beaucoup plu, la campagne avait des couleurs un peu délavées mais, alors que la côte se rapprochait, la lumière a changé et dans certains virages, nous apercevions
la confusion des flots et du ciel dans un même joli bleu.
Sur la plage, personne d'autre qu'une maman et ses trois enfants en train de gonfler plusieurs bouées. Les balançoires du Club Mickey grinçaient sans excès. Confortablement installés sur des serviettes qui ont beaucoup voyagé, nous avons déjeuné en regardant passer quelques voiliers. Nous avons fait une longue ballade les pieds dans l'eau, j'ai observé
un petit banc de poissons. Un pêcheur installait ses lignes. Le soleil était doux et l'eau était bonne.
Nous avons feuilleté un magazine de cuisine où une tarte aux pêches et aux amandes avait l'air terriblement appétissante, et puis on s'est allongé et on n'a plus rien dit. J'écoutais les vagues. En tournant la tête à droite, je pouvais observer une maman qui apprenait patiemment à une petite fille barette sur le côté à jouer à la marelle.
La chambre de l'hôtel était rose et verte, toute pimpante. Dans un vieux magazine que j'avais subtilisé dans le hall, il y avait en photos les recettes du
livre de Fegh que je venais juste de recevoir. Etrange coïncidence; tout à coup
son pain d'épices à la mayonnaise et au ketchup se matérialisait et en devenait presque désirable. Ce soir-là, au dîner, il y avait une soupe de poissons très réconfortante (tout ce qu'on peut attendre d'une telle perspective: une soupe d'une belle couleur, riche en saveurs, bien assaisonnée, servie dans la petite soupière en terre cuite de rigueur avec les inévitables croûtons, la sauce rouille et le fromage râpé) et puis des
araignées de mer que nous avons mis un temps fou à décortiquer en parlant de lectures adolescentes. En dessert, la rafraîchissante simplicité d'un sorbet au citron.
Le front de mer était envahi par les spectateurs d'un feu d'artifice que nous n'avons pas attendu.
Le lendemain matin, après un petit déjeuner digne des pires lendemains de garde, nous sommes retournés sur cette plage, décidément notre préférée. J'ai regardé G. se baigner avec un plaisir évident. La mer était belle.
La vie parfois réserve d'étranges mauvaises surprises, on a l'impression d'être aspiré par le chagrin. Et puis il y a des instants où la vie reprend le dessus; mais un peu comme la marée, les larmes souvent remontent.
G. sait rendre
la vie plus douce. Lors de périgrinations librairesques à la recherche d'une nouvelle lecture, il est tombé nez à nez avec
un livre que j'avais offert à mes parents et qui n'était plus réédité, pour notre plus grand regret. Nous étions ravis de l'avoir à notre tour et j'ai expérimenté le soir même une délicieuse recette épicée.
Cashew ginger pouletPour deux personnes-deux blancs de poulet élevé sainement
-un demi poivron vert
-une demie aubergine (ou si vous en trouvez, des petites aubergines thaïes)
-1 piment égrainé et émincé
-un gros pouce de gingembre en minuscules dés
-3 gousses d'ail passées au presse ail
-une poignée de noix de cajou
-2 cuillères à soupe de sauce huître
-1 cuillère à soupe de sauce soja
-un peu de maggi
-un peu de sucre
-un peu d'huile neutre
-de la coriandre fraîche
Emincer le poulet en fines lanières.
Couper le poivron en lanières également, l'aubergine en dés de taille moyenne.
Chauffer l'huile dans une grande poêle, faire revenir le piment, les noix de cajou, ajouter la volaille, l'ail, le gingembre et faire sauter jusqu'à ce que le poulet commence à dorer.
Ajouter le poivron et l'aubergine, poursuivre la cuisson pendant cinq minutes.
Ajouter les condiments et laisser réduire un peu la sauce.
Parsemer de coriandre ciselée et servir immédiatement, avec un peu de riz.
