jeudi 10 janvier 2008

Rois et reines -une galette au chocolat et à la confiture de framboises-

De 2007, il ne me reste finalement que quelques images floues, des phrases tronquées, des mots hachés; mais quand même quelques persistances rétiniennes...
Je me souviens de Ludivine Sagnier dans un beau manteau blanc qui demande à Louis Garrel Pourquoi es-tu venu si tard? Et dans le même film, Chiara Mastroianni est plus belle que jamais. Les chansons d'amour vient de sortir en dvd, n'hésitez pas une seconde.


Je me souviens du premier coup de cuillère dans un soufflé à l'orange, révélant ainsi un intense et dégoulinant coeur chocolaté.
Je me souviens avoir oublié mes lunettes de soleil et les avoir cruellement regrettées quand on est arrivé à Lisbonne fin juillet.
Je me souviens qu'on a essayé de voir Les climats et La forêt de Mogari mais qu'on est parti bien avant la fin (quand on lit les critiques des Climats, on a l'impression que c'est un film patoumesque mais en fait non).
Je me souviens que je ne savais pas qui était Diane Kruger quand elle a présenté les cérémonies officielles cannoises. J'ai déjà oublié qui c'était.
Je me souviens du rouget aux petits légumes, de la tarte à la framboise et de la glace à la vanille dégustés à Miremont en regardant les flots.
Je me souviens que Benoït XVI s'est opposé très tôt dans l'année au mariage homosexuel.
Je me souviens d'avoir lamentablement peiné devant le dossier n°8 de l'internat, un dossier de pédia, magistralement raté. Un moment d'absence qui se paie à prix fort.
Je me souviens que je n'ai pas terminé certains livres que l'on m'avait offerts.
Je me souviens des fleurs de jasmin qui s'échappent du corsage de la mamie de Marjane Satrapi.


Je me souviens d'un jus de pamplemousse à l'hôtel Amour.
Je me souviens avoir eu atrocement mal aux pieds dans des Repetto en cuir verni rouge que je n'ai pas achetées.
Je me souviens qu'en plein été, Bergman et Antonioni sont morts.
Je me souviens que le soir du deuxième tour des élections présidentielles, pour couper court à la nausée, on est descendu rejoindre la foule qui manifestait son mécontentement, son dégoût, mais pas encore son abattement. Où sont partis tous ces gens maintenant qu'existent vraiment les franchises médicales, les tests adn, les fichiers informatisés des sans papiers, que l'on envoie la police charger contre ceux qui n'ont plus que la rue comme refuge? Il n'y a décidément pas que moi qui ai la mémoire courte.
Je me souviens du matin de janvier où je me suis réveillée de ma dernière garde d'externe.
Je me souviens que je me suis assoupie devant Inland empire (et même que j'ai été déçue par un revisionnage de Mulholland Drive. Qui l'eût cru?)
Je me souviens que j'ai essayé une très jolie robe qui ne m'allait pas du tout.
Je me souviens de la lecture de L'oeuvre au noir, et de La physique des catastrophes dans le bus en allant à l'hôpital psychiatrique. Je ne lis plus rien dans le métro en allant dans l'actuel atroce service: juste pas envie.
Je me souviens d'un Playmobil géant à la fenêtre du bistrot des Enfants terribles (et G. a ensuite regardé sur e bay combien pouvait coûter un tel personnage).
Je me souviens que Zhulan Chan n'avait que 51 ans quand elle s'est fatalement defenestrée parce qu'elle entendait la police arriver.
Je me souviens avoir entendu en direct à la radio que le prix Nobel de littérature était attribué à Doris Lessing.
Et vous, de quoi vous souvenez-vous? (question que nous avaient posée deux étudiants en cinéma au Père Lachaise et à qui je n'ai pas répondu, par timidité de la caméra).

Il peut y avoir nombreuses réticences quant à la confection d'une galette des rois (faire de la pâte feuilletée c'est super long, en plus c'est déjà super gras, alors avec la frangipane, ça va être super lourd...) mais au final, c'était super bon.
Alors oui, j'ai faillit abandonner cent vingt mille fois la pâte sur son plan de travail (une grande feuille de papier sulfurisée scotchée sur la table de la cuisine) mais, grâce au soutien moral (et surtout physique: c'est quand même pas facile à étaler ce truc, même avec un rouleau à pâtisserie violet) de G., il y a eu dimanche après-midi, un délicat parfum de pâte feuilletée au cacao dans la cuisine.
D'habitude, je trouve que les variations sur les classiques leur sont plutôt dommageables mais cette galette hérétique est vraiment irrésistible: la frangipane au chocolat est recouverte avant cuisson d'une très fine couche de confiture de framboises qui apporte une note fruitée et acidulée très subtile après fusion.
Et puis dimanche soir, comme il pleuvait en sortant de la séance d'Actrices, on s'est abrité sous le store d'un petit restaurant libanais. Les banquettes à l'intérieur avait l'air accueillantes et le serveur m'a fait un sourire plein de bonhommie alors nous sommes rentrés grignoter quelques bricoles délicieuses (ils sont quand même très forts pour ces petites galettes au fromage et ces petits chaussons à la viande épicée) avant de retrouver à la maison la jolie galette crousti fondante qui s'est doucement réchauffée pendant que le thé se préparait. Comme il n'en restait plus une miette, j'en conclu que la quantité de gras est tout à fait acceptable -ahem-.

La galette au chocolat et à la confiture de framboises (inspirée de ce livre)
Pour 4 à 6 personnes
Pour ne pas me décourager, j'ai fait la frangipane deux jours avant la cuisson de la galette et j'ai commencé la pâte la veille, ce qui fait que le jour j, il n'y avait plus qu'à donner deux tours de rouleau à la pâte)

La pâte feuilletée au cacao
La détrempe
-250g de farine
-30g de beurre demi-sel fondu
-12,5cL d'eau
Le beurre de tourage
-25g de cacao non sucré
-250g de beurre mou
-15g de sucre glace

La frangipane au chocolat (il en restera forcément mais elle se congèle très bien et le jour où vous aurez envie d'une tarte Bourdaloue au chocolat, hop, il suffira de faire une pâte sablée et de pocher des poires dans un sirop vanillé)
-80g de chocolat à pâtisser fondu
-80g de beurre mou (vous êtes priés de ne pas faire la somme totale de beurre nécessaire)
-80g de poudre d'amandes
-80g de sucre
-15g de maïzena
-1 oeuf
-100g de crème pâtissière préparée comme indiqué ci dessous

La crème pâtissière
-12,5 cL de lait
-30g de sucre
-1 jaune d'oeuf
-une cuillère à café très rase de maïzena
-12,5g de beurre froid en petits morceaux

et puis environ deux cuillères à soupe de confiture de framboises additionnée d'un peu de jus de citron et un jaune d'oeuf avec un peu de lait pour le dorage.

Pour la crème pâtissière, porter à ébullition le lait avec la moitié du sucre.
Pendant qu'il bout, fouetter le jaune d'oeuf avec le sucre restant jusqu'à ce que le mélange blanchisse, ajouter la maïzena avant de verser le lait sucré bouillant. Ne pas arrêter de remuer puis remettre sur le feu jusqu'à épaississement. Quand celui ci est obtenu, éteindre le gaz et ajouter le beurre. Lisser et réserver.
Pour la frangipane, fouetter le beurre avec la poudre d'amandes puis ajouter le sucre puis l'oeuf. Bien mélanger puis incorporer un à un la maïzena, la crème pâtissière et le chocolat fondu.
Pour la pâte feuilletée, mélanger le beurre mou avec le cacao et le sucre. Reformer un parallélépipède plus plat que celui de départ, l'emprisonner dans du papier film et le laisser une heure au réfrigérateur.
Préparer la détrempe en mettant la farine dans un saladier, creuser un puits, y verser le beurre fondu et l'eau. Amalgamer rapidement pour former une boule de pâte à filmer et à laisser également une heure au réfrigérateur.
Sur un plan de travail recouvert de papier sulfurisé, étaler la détrempe en carré. Déposer le beurre en son centre et rabattre les bords.
Etaler cette ébauche de pâte en un rectangle de 50cm sur 20 cm. Plier en trois en rabattant une des extrémités vers le milieu et la deuxième sur le dessus (G. est à votre disposition pour fournir des schémas explicatifs).
Tourner la pâte d'un quart de tour et répéter l'opération.
Filmer et laisser une heure au réfrigérateur.
Renouveler la séance d'étalage pliage deux fois en laissant une heure de repos au frais entre chaque séance.
Au bout de tout ce temps (et de beaucoup d'acharnement), étaler la pâte sur une épaisseur d'environ 2mm.
Découper deux cercles de 20cm de diamètre. Sur l'un étaler la frangipane en laissant une marge de 2cm sur les bords. Répartir la confiture de framboises. A un moment, penser à déposer une fève, qu'elle soit ou non en forme de cafetière italienne.
Recouvrir le tout avec le deuxième cercle de pâte, bien souder les bords, faire le dessin qui vous plaît sur le dessus, dorer au jaune d'oeuf et au lait, enfourner environ trente minutes dans un four préchauffé à 180° (surveiller).
Tiède, c'est juste à se damner.

22 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Magistral et somptueux. Une galette comme ça, je travrse la france pour la déguster. De 2007, je me souviens avoir fait la connaissance de Patoumi, une belle personne. N'aie pas peur de ce que tu considères comme un échec. c'est juste un chemin détourné qui te permettra d'arriver au but. Tous les chemins mènent à Rome donc patience, patience. Ne perds pas de vue tes rêves, tes idéaux, tes envies. prends soin de toi et fais signe si tu passes par paris,

Lisanka

10 janvier, 2008 10:20  
Blogger Rosa's Yummy Yums said...

Une merveilleuse galette! Vraiment très tentante et délicieuse!

Bises,

Rosa

10 janvier, 2008 11:47  
Blogger Liliy Gnocchi said...

Comment je vais faire mes courses si je calcule pas la somme totale de beurre que je dois acheter pour goûter à cette merveille? Frangipane plus chocolat chez la fée Patoumi égale une Liliy qui fait des bonds avant même d'y avoir goûté...!

10 janvier, 2008 11:54  
Anonymous Anonyme said...

Je me souviens qu'en 2007 j'ai découvert un blog d'une interne en médecine d'une rare sensibilité, dotée d'un terrible talent d'écriture et qui plus est gourmande.

Je me souviens des belles choses.

10 janvier, 2008 12:32  
Anonymous Anonyme said...

Ton billet (très beurré, aujourd'hui, dis donc) me fait dire que:

je me souviens que Ma femme*, amoureuse de Louis Garrel dans "Les chansons d'amour", a trouvé qu'on ne le voyait vraiment pas assez dans "Actrices", ce qui lui a paru suspect, dans le fond, et inadmissible, dans la forme, d'autant qu'il faisait très froid dans la salle de ciné, ce qui n'a rien arrangé sans doute, c'est pour ça qu'il a fallu boire un french coffee, après.

10 janvier, 2008 14:15  
Blogger Anso said...

Merci pour cette belle page de souvenir et ta délicieuse hérésie !! Et courage pour tes projets ...

10 janvier, 2008 14:45  
Blogger Flo said...

Quelle galette ! Tu as une sacrée motivation, parce que la pâte feuilletée, je n'arrive pas à m'y mettre ;-) et les souvenirs... et bien ça se bat au portillon ;-)

10 janvier, 2008 15:14  
Blogger Gracianne said...

La, sur le coup, je ne me souviens plus de rien du tout, comme un vide. Mais tes souvenirs a toi etaient agreables a lire.
Ah si je ne me souviens qu'hier je me suis dit que je descendrais bien dans la rue, ca commence a me gratter.

10 janvier, 2008 16:36  
Anonymous Anonyme said...

whaou, ça a l'air trop bon! et original en plus!

10 janvier, 2008 20:26  
Anonymous Anonyme said...

Je me souviens que j'ai raté mon dernier cours de dessin (en croyant que je reverrai tout le monde en septembre, et finalement non).
Je me souviens d'un livre très triste fini dans le train au retour d'Amsterdam.
Je me souviens des pique-niques de cet été, surtout celui à Avignon.
(encore un billet parfait, Patoumi, bises!)

10 janvier, 2008 23:05  
Anonymous Anonyme said...

C'est toujours aussi agréable de passer par ici ! Je te souhaite encore plus de petits bonheurs, de bons films, de bons bouquins et de jolies gourmandises pour cette année 2008 !!!
Et tu sais quoi ? Quand on était gamins, mon oncle aussi avait craqué sur d'immenses playmobiles d'expo, et après une opération commando, on en avait eu un en cadeau, je te dis pas la surprise !!!
Je tenterais bien une version de ta galette en tarte, miam miam...

11 janvier, 2008 15:46  
Blogger stef said...

Une année bien remplie mais je retiens une chose, je descendrais bien dans la rue à nouveau crier haut et fort car ce n'est tout simplement plus possible!!!

11 janvier, 2008 17:36  
Anonymous Anonyme said...

Je n'aime pas la galette car je n'aime pas la frangipane... N. adore la galette et se pâme pour de la frangipane. Du coup il a décidé de me faire aimer la galette... C'est pas gagné ^^, mais avec une association choco-framboise comme la tienne je suis sure que ça irait... :)
On a fait notre pâte feuilletée hier soir (c'était la deuxième fois que j'en faisais et j'ai choisi cette fois ci la recette de mercotte et j'ai trouvé ça beaucoup plus facile que la première fois...) et la galette ce sera demain, on a choisi des parfums pas très traditionels pour que j'ai une chance d'aimer (pistache - citron - cranberries)...

Je me souviens d'éclats de rire devant Little Miss Sunshine
Je me souviens de vacances marocaines ratées par l'annonce d'une mauvaise, très mauvaise nouvelle...
Je me souviens de boules au ventre, de cris, de pleurs et d'insomnies
Je me souviens de piques niques printanniers gourmands et souriants
Je me souviens...

12 janvier, 2008 13:30  
Blogger lena sous le figuier said...

Quelle galette originale, subtile et trop tentante! Je note pour l'an prochain, quoique je trouve dommage que tu ne fêtes pas les rois une semaine avant, ce qui nous permettrait...

Je frise aussi l'exaspération, d'autant que celle ci est mâtinée d'une bonne dose d'impuissance...

12 janvier, 2008 14:30  
Anonymous Anonyme said...

Encore un billet, et une merveilleuse galette, qui font rêver. A bientôt Patoumi.

12 janvier, 2008 16:20  
Anonymous Anonyme said...

Elles sont bien, tes persistances, on a l'impression de se promener avec toi... ça me donne envie d'être plus attentive à ce qui adviendra, en 2008. Encore abonne année à toi!

13 janvier, 2008 00:46  
Blogger Saperlipopote ! said...

je me souviens avoir découvert ton blog et tes messages avec des mots en rose
je me souviens que j'ai trouvé ça bien de te mettre dans ma liste de "Favoris"
mais je ne me souviens pas t'avoir souhaité Bonne Année 2007... alors je répare pour 2008
qu'elle soit bonne (et que les esprits ne s'endorment pas.... : manif OGM aujourd'hui à Tours)

13 janvier, 2008 01:09  
Blogger Alhya said...

j'aime lire tes souvenirs, en me régalant de gnoccis très chauds, et en rêvant quelques secondes à la sensation formidable que je ressentirais, si j'avais la possibilité de croquer dans ta fabuleuse galettes trop gourmande

14 janvier, 2008 12:57  
Blogger Natalia Kriskova said...

Jolie galette, même si pour ma part, je n'aime pas le chocolat dans la pâte feuilletée, c'est une vieux blocage contre lequel je ne peux rien (d'où un rejet des pains au chocolat, mais ça fait le bonheur des autres, heureusement...)
Je me souviens que j'ai pris l'avion Dakar-Paris avec un léger pincement au coeur, mais rien de plus ; maintenant, quand j'y repense, c'est un gros, gros pincement au coeur...

14 janvier, 2008 17:08  
Blogger annie dedicacessen said...

c'est marrant, je voulais aussi faire un "je me souviens". Et puis je suis passée à autre chose. bah, j'ai le temps, on peut se souvenir même au printemps. jolie, la galette.

15 janvier, 2008 12:34  
Anonymous Anonyme said...

Une galette dans laquelle on a envie de croquer ... même si on préfère les couronnes briochées !

J'ai lu avec délice ce petit survol de 2007 et pense avec émotion que nous avons des souvenirs communs.

Vive 2008 !

20 janvier, 2008 22:07  
Blogger nikka said...

Ça devait pas être le bon jour que tu allée voir La Forêt de Mogari, parce que j'ai quand même envie de soutenir que c'est patoumesque à mort. Comme tout ce que fait Naomi Kawase.

07 juin, 2009 22:12  

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