Le potimarron du capitaine Haddock
On ne les voit pas souvent manger, dans les albums de Tintin. Il est certain qu'entre deux trafics d'esclaves et la mystérieuse disparition d'éminents scientifiques, on n'a pas vraiment le temps de se mettre à table. Ainsi les poulets rôtis sont ils dévorés sans façon à l'arrière d'un wagon citerne rempli de Loch Lomon, les miches de pains dérobées à un poste frontière syldave sont avalées rapidos au milieu des rochers et, si l'on prend le temps de commander dans un restaurant du szlaszec aux champignons, c'est uniquement dans le but de faire progresser l'enquête. On sait s'adapter aux nourritures locales, pour preuve cette tsampa goûtée sur les hauteurs tibétaines. Milou se doit de se prononcer sur une ratatouille aux piments et j'ai appris ce que signifiait "al dente" vers l'âge de sept ans en voyant la Castafiore renverser une marmite entière de spaghetti sur le crâne de son geôlier (moustachu si je me souviens bien). J'ai appris à lire avec L'Etoile mystérieuse et quand je n'arrivais pas à dormir dans ma chambre rose de petite fille (persuadée qu'il y avait un monstre à longues dents dans l'armoire blanche ou un type louche caché sur le balcon sur lequel donnait la grande fenêtre de ma chambre), j'avalais frénétiquement les aventures de Tintin dont les lectures répétées n'altèrent mystérieusement pas le plaisir. Je n'ai pourtant pas la trempe d'une aventurière, et je n'aime guère les récits rocambolesques, je préfères les histoires de salon, où il ne se passe que peu de choses dans le fond, mais il y a dans les Tintin un étrange charme que je n'explique pas. Moi qui déteste la science fiction, j'aime par dessus-tout l'histoire d'extra-terrestres de Vol 714 pour Sydney (il nous arrive, à la terrasse de café ou sur des plages de sable brûlant de sortir des petits carnets de bataille navale achetés dans une boutique branchée de Coimbra -où il y avait un super joli teeshirt turquoise avec un arbre rose- et de faire une partie comme ça, pour rigoler. Je perds systématiquement et je pense toujours au petit écran qui permet de tricher dans l'avion de M.Carreidas).
L'album que je préfère, c'est Tintin au Tibet. Et vous?
Je n'ai pas relu d'aventures de Tintin depuis une dizaine d'années, il m'arrive juste de les feuilleter et je crois que si je les aime bien, c'est à cause du souvenir de leur lecture apaisante dans la chambre qui, bien qu'elle fût rose, n'en était pas moins pour moi le temple de tous les monstres.
En petit hommage à ces compagnons de nuits sans sommeil, une jolie recette de potimarron farci au haddock, sur une idée de G. (qui montre toujours quelques réticences quand je m'empare avec un enthousiasme sans doute excessif des jolis cucurbitacés qui s'alignent joliment sur l'étal du maraîcher -je n'y peux rien, le plaisir des yeux est parfois aussi important que celui des papilles, j'ai acheté l'autre jour des yaourts parce que le pot était beau. Heureusement, ils étaient très bons-).
Le potimarron du capitaine Haddock
Pour deux personnes
-2 petits potimarrons
-120g de haddock
-3 tranches de pancetta
-3 gousses d'ail
-1 échalote
-du persil
-1 cuillère à soupe de crème fraîche
-1 demie boule de mozzarella
-1 oeuf
-un trait de sirop d'érable
-du poivre du moulin
Pocher le haddock cinq minutes dans une casserole frémissante d'eau et de lait. Une fois prêt, le réserver.
Hacher l'ail, l'échalote et le persil. Emincer la pancetta, couper la mozzarella en tout petits cubes.
Rassembler tous les ingrédients dans un saladier et bien amalgamer. Rajouter le haddock préalablement émietté.
Couper le chapeau des potimarrons et les vider. Remplir la cavité ainsi créée avec la farce. Remettre les chapeaux et faire cuire à 180° environ 45 minutes (surveiller, arrêter quand la peau des potimarrrons a noirci par endroit).
Délicieux et surprenant.
Loin des auteurs dont tout le monde parle (et dont les qualités littéraires sont parfois inversement proportionnelles à l'espace médiatique qu'ils occupent), Line Anselem avait sorti en 2006 chez Allia un petit livre très joli et très chouette qui m'a ravi de pages en pages par son ton à la fois naïf et érudit, son humour doux et léger, cette maîtrise très particulière qu'il faut avoir pour parler de l'enfance sans avoir l'air mièvre et puis aussi les multiples évocations culinaires dispersées le long du livre. Petites histoires de la rue Saint Nicolas raconte l'enfance de Line, petite fille juive marocaine, dans l'appartement parisien qu'elle partage avec son père, un homme très pieux qui sait choisir les pastèques, sa mère qui fait une divine gelée de coing, sa soeur Esther et son frère Jimy. Elle évoque aussi les autres habitants de leur immeuble qu'il leur arrive de croiser au marché d'Aligre, dont l'inénarrable Madame Tchitchi qui aime préparer du tilleul aux enfants. Entre la sortie cinéma des Aristochats et la découverte simultanée chez une amie de L'île aux enfants ("Casimir a l'air bête") et de la recette du coq au vin, Line Anselem sait aussi évoquer les différentes fêtes juives non sans une certaine gourmandise. Il y a les gâteaux du samedi soir mais aussi le menu de Pessah (les fèves et les pois chiches frits, les tripes sauce à l'ail, au vinaigre et aux oeufs, la salade d'orange amère, l'agneau à la sauce jaune et les grandes patates sautées, l'agro de sido, ce sirop de citron au goût de caramel...) et celui de Rosh Hashana avec les olives, les jujubes, la grenade et tous les légumes qui cuisent dans une marmite avec de la cannelle et une demie tête de veau! J'ai aussi appris ce en quoi consistaient la dafina et le jeu bélola.
Un livre précieux. Et j'ai été heureuse d'apprendre que je n'ai pas été la seule petite fille à dormir sur un canapé vert jusqu'à l'âge de six ans.
L'album que je préfère, c'est Tintin au Tibet. Et vous?
Je n'ai pas relu d'aventures de Tintin depuis une dizaine d'années, il m'arrive juste de les feuilleter et je crois que si je les aime bien, c'est à cause du souvenir de leur lecture apaisante dans la chambre qui, bien qu'elle fût rose, n'en était pas moins pour moi le temple de tous les monstres.
En petit hommage à ces compagnons de nuits sans sommeil, une jolie recette de potimarron farci au haddock, sur une idée de G. (qui montre toujours quelques réticences quand je m'empare avec un enthousiasme sans doute excessif des jolis cucurbitacés qui s'alignent joliment sur l'étal du maraîcher -je n'y peux rien, le plaisir des yeux est parfois aussi important que celui des papilles, j'ai acheté l'autre jour des yaourts parce que le pot était beau. Heureusement, ils étaient très bons-).
Le potimarron du capitaine Haddock
Pour deux personnes
-2 petits potimarrons
-120g de haddock
-3 tranches de pancetta
-3 gousses d'ail
-1 échalote
-du persil
-1 cuillère à soupe de crème fraîche
-1 demie boule de mozzarella
-1 oeuf
-un trait de sirop d'érable
-du poivre du moulin
Pocher le haddock cinq minutes dans une casserole frémissante d'eau et de lait. Une fois prêt, le réserver.
Hacher l'ail, l'échalote et le persil. Emincer la pancetta, couper la mozzarella en tout petits cubes.
Rassembler tous les ingrédients dans un saladier et bien amalgamer. Rajouter le haddock préalablement émietté.
Couper le chapeau des potimarrons et les vider. Remplir la cavité ainsi créée avec la farce. Remettre les chapeaux et faire cuire à 180° environ 45 minutes (surveiller, arrêter quand la peau des potimarrrons a noirci par endroit).
Délicieux et surprenant.
Loin des auteurs dont tout le monde parle (et dont les qualités littéraires sont parfois inversement proportionnelles à l'espace médiatique qu'ils occupent), Line Anselem avait sorti en 2006 chez Allia un petit livre très joli et très chouette qui m'a ravi de pages en pages par son ton à la fois naïf et érudit, son humour doux et léger, cette maîtrise très particulière qu'il faut avoir pour parler de l'enfance sans avoir l'air mièvre et puis aussi les multiples évocations culinaires dispersées le long du livre. Petites histoires de la rue Saint Nicolas raconte l'enfance de Line, petite fille juive marocaine, dans l'appartement parisien qu'elle partage avec son père, un homme très pieux qui sait choisir les pastèques, sa mère qui fait une divine gelée de coing, sa soeur Esther et son frère Jimy. Elle évoque aussi les autres habitants de leur immeuble qu'il leur arrive de croiser au marché d'Aligre, dont l'inénarrable Madame Tchitchi qui aime préparer du tilleul aux enfants. Entre la sortie cinéma des Aristochats et la découverte simultanée chez une amie de L'île aux enfants ("Casimir a l'air bête") et de la recette du coq au vin, Line Anselem sait aussi évoquer les différentes fêtes juives non sans une certaine gourmandise. Il y a les gâteaux du samedi soir mais aussi le menu de Pessah (les fèves et les pois chiches frits, les tripes sauce à l'ail, au vinaigre et aux oeufs, la salade d'orange amère, l'agneau à la sauce jaune et les grandes patates sautées, l'agro de sido, ce sirop de citron au goût de caramel...) et celui de Rosh Hashana avec les olives, les jujubes, la grenade et tous les légumes qui cuisent dans une marmite avec de la cannelle et une demie tête de veau! J'ai aussi appris ce en quoi consistaient la dafina et le jeu bélola.
Un livre précieux. Et j'ai été heureuse d'apprendre que je n'ai pas été la seule petite fille à dormir sur un canapé vert jusqu'à l'âge de six ans.
19 Comments:
Un joli potimarron et un chouette récit, je suis tentée par cette recette de farci!
cette belle recette,me tente ...
jolie recette et joli texte (et pour moi, c'est plutôt les deux albums des 7 boules de cristal et du temple du soleil... la momie de rascar capak m'effrayait et c'était bon!)
Parler de l'enfance tout comme lire un aussi joli récit de ses souvenirs provoque tjrs chez moi une sorte d'apaisement, de calme soudain..et ça fait du bien! et si en prime on peut gouter du haddock caché dans un potimarron, alors là ce le bonheur!
Ca me fait tellement de bien de lire des choses comme cela! J'ai baigné dans la culture Tintin au point de vouloir me marier avec ce dernier. Et quand j'ai compris qu'il n'était que de BD, j'ai jeté mon dévolu sur Hergé et me suis intéressée à sa biographie. Mon album préféré est également le tien. Je me suis éprise de la culture tibétaine à la suite de mes lectures tintinesques et ma chambre chez mes parents ainsi que ma garde-robe reflète ces années là aussi ;-).
Quand tu viendras à Paris, on pourra se faire un resto tibétain si tu es tentée. J'en connais des biens ;-)
Tout ça pour dire parce que j'ai encore beaucoup parlé de moi que ta recette de farci est très chouette. Ton potimarron a une belle tronche. Moi (encore décidément, serais-je narcissique?) j'en ai fait de la purée hier. Et c'était trop bon!
Pour les yaourts, je fais pareil. Ne serait-ce pas les yaourts La Vache que tu as trouvés beaux et bons?
Oh ben non, Patoumi... Si tu me piques Tintin, je fais quoi moi ? :) j'ai appris à lire avec les tintins de mon frangin. Avant d'y comprendre quoi que ce soit, je les tenais déjà très sérieusement sur mes genoux, à l'envers et les feulletais gravement pendant que mon père lisait son journal. Je me souviens encore que je murmurais des histoires avant de pouvoir les déchiffrer. J'en inventais. Je les relis régulièrement. Mon préféré ? pfffffffff....
J'ai une tendresse particulère pour l'oreille cassée parce que c'est le seul que mon frangin n'avait plus et que j'ai été obligée de l'attendre... Mais non, c'est pas mon pref'...
Tintin au Tibet, oui, bien sûr, le yéti... mais j'étais jalouse de Chang (à mes souhaits ?)... Objectif lune et la colère de tournesol ? le lotus bleu et le poison qui rend fou ? "je vais vous montrer la voie"... Le secret de la licorne ? le trésor de rackham le rouge ?
Les bijoux de la Castafiore, j'ai adoré, parce que c'était pas les gitans. Et parce que c'était reposant (je suis comme toi, j'ai jamais compris pourquoi j'aimais Tintin alors que ses aventures correspondaient si peu à ce que j'aimais lire)....
Mais bon... ça se fait pas de préférer les Bijoux... Non, bon, allez : l'affaire tournesol et le temple du soleil. Quoique... :)
hmmm ! il cuisine drôlement bien le capitaine Haddock. J'ai une passion pour le potimarron, joli, parfumé et pas besoin de l'éplucher fastidieusement... Quant à Tintin, sa lecture n'est pas un souvenir d'enfance, et du coup je pense que je n'y ai pas trouvé la même saveur. .. D'ailleurs merci pour les saveurs de la rue saint-Nicolas !
C'est toujours un grand plaisir de te lire, mais cette fois, je te dois mon menu d'halloween, un prétexte pour organiser une soirée bloody mary. Mais je n'avais pas encore d'idée plat. Merci!
Mon Tintin préféré, c'est objectif lune, avec l'inénarrable scène où Tournesol répète: ah, je fais le zouave.
Merci aussi pour les conseils de lecture.
Bises.
Sonia
Pareil ! Pas aventurière pour deux sous mais les Tintin, je les ai tous dévorés (et je les regardais même sur FR3 ;-)). Si je devais en choisir un, c'est dur, mais je dirais peut-être l'affaire Tournesol.
En tout cas, il est bien original ce potimarron, mille milliards de mille sabords !!
Bises
Moi, j'étais persuadée qu'il y avait une vie sous mon lit et que forcément quand je regardais sous le lit (quand j'osais) ils disparaissaient via une trappe... :)
Alors quand je n'arrivais pas à dormir, je devorais la bibliothèque rose à la lampe de poche (et puis comme j'en ai vite eu marre de la lampe de poche, j'ai colorié un morceau de feuille en noir et je l'ai collé à l'arrière de ma serrure, comme ça ma mère ne pouvait rien détecter ^^)
Bizarrement le haddock c'est pas un truc auquel je pense souvent, mais ton potimarraon, que ce soit au haddock ou à autre chose, je le garde dans un coin de ma tête...
Belle recette, et j'adore la première photo "truquée". C'est intéressant que ton album préféré soit Tintin au Tibet car si tu n'as pas vu le documentaire "Tintin et Moi", Hergé raconte qu'il a fait cet album dans sa période de dépression profonde, donc tout était blanc. Moi j'adorais les 7 boules de cristal et le sceptre d'ottokar, mais je les aime tous.
je ne lisais pas Tintin quand j'étais petite mais ta recette au potimarron m'intéresse car à part en soupe, je n'ai jamais osé..
Alors, tiens-toi bien : je n'ai jamais lu Tintin ! mais ton potimarron a une bien jolie couleur.
(Cette nuit, j'ai rêvé qu'on se rencontrait... Tu mesures combien ?)
Je dois avouer que cela fait bien longtemps que je n'ai lu les aventures de Tintin...
En tous les cas ta recette me plait bien.
Bises et bientôt
paola
Définitivement Vol 714, et je crois que tu sais déjà que mon fils a appris à lire avec Tintin (il les regardait déjà sur son pot, à deux ans et demi) (j'ai des preuves en photos). Il faut l'entendre dire "mille sabords" quand il se met du dentifrice sur le pull.
Les potitrucs, j'avoue, ça m'angoisse, je pense que c'est un truc de filles.
Petite, j'ai toujours aimé Les Bijoux de la Castafiore ...Je suis d'accord, il ne s'y passe pas grand chose mais j'ai toujours été attachée à cet album.
Ton potimarron est TRES appétissant !
Il a bien des qualités, finalement, le capitaine Haddock, ne serait-ce que de concocter des plats pareils. Mmm!
une vraie découverte, merci pour ce blog magnifique, j'aime beaucoup ton côté très esthétique, des mots, des images ... et tintin au tibet est aussi mon tintin préféré, peut etre parce que c'est le premier que j'ai lu ...
MIAMMMMM
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