mercredi 29 novembre 2006

Osso buco in bianco, gremolata, il est fini le temps des raviolis

Il fut un temps, qui me semble désormais fort lointain, où G. et moi n'habitions pas ensemble. Mon appartement se résumait alors à une seule pièce, certes très jolie avec ses poutres, son parquet et sa cheminée, certes très bien placée puisqu'en bas de la Place des Lices, mais quand même très exiguë et froide l'hiver. G., quant à lui, habitait au douzième étage un appartement bien plus grand et dont j'aimais beaucoup la vue du balcon, surtout le soir, avec toutes les lumières de la ville qui tremblotent doucement.
Souvent, pour nous retrouver en fin de journée, nous nous donnions rendez-vous dans une librairie; comme cela, si l'un avait du retard, l'autre avait de quoi s'occuper. Parfois aussi, je prenais le bus et traversais toute la ville pour le retrouver chez lui.
A cette époque, et bien que la cuisine m'interessât déjà beaucoup (quand j'étais petite, j'adorais jouer à la dînette et à la marchande. L'un de mes scénarii favoris était alors d'imaginer que je recevais le Président de la République à dîner et que je devais donc préparer le repas en conséquence, l'une de mes entrées fétiches étant alors "Le pâté de lapin au cerfeuil". Ne me demandez pas d'où je sors ça, il aurait alors été plus logique pour moi de mettre au menu des rouleaux de printemps mais bon), je n'osais pas trop mettre cela en avant, euh, j'en avais un peu honte parce qu'en ces temps reculés, je croyais que la cuisine était une discipline futile (j'ai bien revu mon jugement depuis...) et qu'il valait mieux maîtriser Gilles Deleuze que Pierre Hermé, du moins en société.
Ainsi, quand nous n'allions pas manger dehors, nous nous contentions de dîners quelque peu épurés: des salades (parfois même industrielles), des kebabs, des tartines, des raviolis chinois (à l'époque j'adorais ça les Dim Sum, nous les achetions congelés par paquets gigantesques et je les faisais consciencieusement cuire dans le petit panier vapeur en bambou. Malheureusement, comme il arrive souvent avec ce dont on abuse, ils ont fini par me dégoûter et rien que d'y penser... berk) et parfois, les dimanches soirs, divers currys et satays improvisés avec le contenu du placard puisque bien sûr, faire les courses, ce n'était pas vraiment dans nos habitudes.
J'aurais pu trouver inadmissible de faire passer les plaisirs oraux ainsi au second plan mais je n'étais pas assez sûre de mes capacités culinaires pour les mettre en avant et le peu de temps que nous passions à table (qui d'ailleurs n'existait pas) permettait une nette compensation scopique: je n'ai jamais vu autant de films qu'à cette époque. Barry Lindon, Le miroir, La honte, La forteresse cachée, c'était si beau que j'en oubliais le menu.
Quand nous avons déménagé, je me suis tout de suite sentie très bien dans le nouvel appartement. La cuisine est jolie et fonctionnelle, et peu à peu, j'ai osé mettre mes fantasmes culinaires à exécution. Pour mon plus grand soulagement, G. n'a pas du tout trouvé cela futile, bien au contraire, il a largement contribué à alimenter la bibliothèque en livres de cuisine, les placards en ustensiles et il passe souvent derrière les fourneaux, pour mon plus grand plaisir.
Jamais à l'époque des raviolis je n'aurais pensé faire un jour de l'osso buco, je croyais qu'il n'y avait que les mamans qui sachent bien faire cela, mais au vu du résultat, délicieux, je pense que j'en referai!
Je me suis largement inspirée de la recette de Laura Zavan; son livre Ma little Italy fait partie de mes préférés: il est joli, il y a des anecdotes et des informations très précises sur les produits, c'est très agréable à lire, on a l'impression d'être en vacances en Italie!

L'osso buco in bianco inspiré de celui de Laura Z
Pour deux personnes
2 tranches de jarret de veau
2 carottes
2 oignons rouges
3 champignons de Paris
12,5 cL de vin blanc sec d'Alsace
25 cL de bouillon de poule
5 anchois à l'huile coupés en petits morceaux
un peu de farine
un peu de beurre
un peu d'huile d'olive

Fariner la viande.
Faire chauffer le beurre et l'huile d'olive dans une grande poêle et y faire revenir les tranches de jarret.
Quand elles sont dorées, les sortir, les réserver au chaud et jeter le gras de la poêle.
Y verser un filet d'huile d'olive et faire revenir les légumes coupés en minuscules dés.
Au bout de quelques minutes ajouter les anchois et les faire fondre.
Verser le vin et gratter la poêle pour bien décoller les sucs.
Laisser bouillir quelques instants puis déposer la viande et verser le bouillon.
Couvrir et laisser sur minuscule feu pendant deux heures.

Je l'ai préparé à midi et je l'ai remis sur le feu pendant une demie heure avant de dîner, le temps de préparer les papardelles qui ont accompagné le plat et la gremolata qui a délicieusement parfumé l'osso buco.

La gremolata
une demie botte de persil
6 gousses d'ail
le zeste d'un demi citron
un peu de jus de citron

Hacher le tout très finement et servir à part.

12 Comments:

Blogger Gracianne said...

Tu pourrais le servir au president de la republique, il ne serait pas decu. Jamais je n'en ai reussi un correct, tu vois, ca n'a rien a voir avec le fait d'etre une maman :)

29 novembre, 2006 14:58  
Blogger Mamina said...

Aujourd'hui où je n'ai pas eu beaucoup le temps de bloguer et absente les quelques jours qui viennent, je ne regrette pas d'avoir lu ton billet. Nous aussi, encore maintenat , nouis nous donnons RV dans une librairie...
Je suis comme toi aussi, j'adore ce livre de cuisine Italienne.

29 novembre, 2006 20:53  
Blogger Fabienne said...

Moi aussi je donne mes rdv dans des librairies, histoire d'attendre en se cultivant !
Alors comme cela tu jouais à servir le Pt de la République !!!

29 novembre, 2006 20:58  
Anonymous Anonyme said...

C'est incroyable comme je peux me reconnaître dans tes propos, lorsque tu dis tes complexes par rapport à ta passion culinaire, "pas assez intellectuelle" ! J'assume beaucoup plus aujourd'ui, mais il y a quand m^me nombre de mes collègues devant qui je n'oserais pas parler de cette passion, car j'ai l'impression que certains ne sont que de "purs esprits" !

29 novembre, 2006 23:05  
Blogger Dorian Nieto said...

Mais alors ça veut dire que tu vas nous proposer un jour la recette du pâté de lapin au cerfeuil ? Pour moi l'Osso bucco est directement lié à un livre grâce auquel je me suis rendu compte que j'étais capable de faire ça dans une cuisine, dire que je suis un inquiet dans une cuisine c'est peu dire et ça n'a jamais changé... le livre c'est la cuisine de bistrot de P. Wells et c'est toujours un de mes petits préférés ! bon c'est pas tout ça j'ai vu un prénom au combien attirant dans ton titre précédent...

30 novembre, 2006 10:37  
Anonymous Anonyme said...

Ah la vraie recette, sans les tomates,
c'est ainsi qu'on l'aime chez nous, on le sert avec un risotto milanaise refroidi que l'on fait sauter comme une petite crêpe.
C'est un plaisir de te lire, Patoumi.

30 novembre, 2006 20:05  
Blogger patoumi said...

Gracianne: c'est le Président qui me déçoit!
Mamina: je sais bien que tu es une femme de goût
Fabienne: je savais pas que tu étais un peu psychanalyste:)
Valérie: j'aime les esprits qui ont aussi un estomac!
Dorian: je ne peux me résoudre à manger Buggs Bunny (même si tout le monde dit que c'est bon et fin)
Léna (tiens comme le personnage de Conte d'été): tu ne t'imagines même pas combien ton commentaire me touche
Estérelle: j'en étais sûre que t'aimais l'osso bucco! Et j'ai pensé à toi quand j'ai vu la photo du crostini au lard de Colonnata dans le livre de Laura...

01 décembre, 2006 14:35  
Anonymous Anonyme said...

Ce billet m'a rappelé mes années de fac ... J'ai toujours préféré le plat du jour du troquet du coin au service du resto'U. On ne se refait pas !

02 décembre, 2006 21:36  
Anonymous Anonyme said...

Ca c'est mortel !

04 décembre, 2006 21:55  
Anonymous Anonyme said...

Evidemment ! c'est le must ton osso bucco !! le mien que tu as vu est un petit plat de "cantine " à côté ! et c'est vrai que tu peux présenter ton plat au président !!Je note bien ta recette ! Merci !!

12 décembre, 2006 08:27  
Anonymous noé said...

Auto-interdite de cuisine pour cause de révisions, je ne renonce pas aux bons plats pour autant... J'ai donc innocemment fourré dans les mains de mon beau un mix de cette recette et de celle de la mangue (pas pu me décider)... et... verdict ce soir, mais hier déjà c'était tellement beau et odorant!

01 octobre, 2009 16:22  
Anonymous M tue Bee said...

et oui, pas de tomates dans l'osso-buco, c'est sûr!
j'aime vraiment beaucoup relire vos anciens billets...

10 mars, 2010 21:34  

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