Un dimanche matin avec Yoko et petits pots très doux au chocolat
Yoko a une vingtaine d'années, une queue de cheval attachée haut et une frange qui souligne ses grands yeux en amande.
Elle porte des chemises de garçon trop grandes pour elle et dont elle laisse toujours défaits les boutons des poignets. Les pantalons aussi sont larges, et elle ne quitte jamais sa grande besace noire qui lui bat les cuisses quand elle prend le train (et cela arrive souvent, pour aller rendre visite à ses parents par exemple. Et j'ai été saisie par les silences laconiques de son père quand il vient la récupérer à la gare. Pour avoir plusieurs fois vécu ces instants-là, je ne peux que reconnaître la justesse du propos: moi aussi, quand mon papa venait me chercher le vendredi soir à la gare de L., j'étais toute embarrassée. Heureuse de le voir mais aussi très gênée de n'avoir rien à dire, avoir peur qu'il s'en rende compte, qu'il pense que je ne l'aime plus mais en même temps incapable de partager avec lui les émotions qui m'habitaient alors, puisqu'il ne m'avait connu qu'à la maison, dans mes pensées adolescentes et qu'elles n'étaient plus tout à fait d'actualité. Incapable d'échanger des banalités ("Il y avait du monde dans le train?" question que posera aussi la belle-mère de Yoko quand ils arriveront à la maison), je me terrais dans un silence qui était probablement très angoissant).
Yoko est journaliste.
Dans son petit studio à Hokkaido, il y a une belle suspension rouge qui descend du plafond, il y a un petit balcon où elle étend son linge avec une grâce sans concurrence (et les fins tee shirts qui se balancent au gré du vent dessinent son grand corps frêle), il y a un réfrigérateur dont sa belle-mère reprochera la vacuité. Il est vrai qu'on ne voit guère Yoko ingurgiter autre chose que plusieurs verres de lait froid et des nouilles instantanées.
Yoko passe beaucoup de temps avec Hajime, un gentil libraire qui trvaille dans le quartier des bouquinistes et qui s'y connait non seulement en graphisme mais aussi en nourritures réconfortantes pour jeunes filles malades.
Dans Café Lumière, le très beau film de Hou Hsiao-Hsien, que j'avais déjà vu un 31 décembre parisien avec G. avant d'aller déguster quelques sushis, se déploie avec beauté et intelligence l'histoire de Yoko qu'on contemple rêver à l'avant des trains ou siroter un lait chaud attablée dans un beau café boisé, sur les traces d'un compositeur disparu et se débattant avec ses propres secrets. Un bonheur pour les yeux et les oreilles (car la bande sonore n'est pas en reste), à déguster un dimanche matin en même temps qu'une tasse de thé vert délicatement parfumé à la fleur de cerisier (le hanami impérial de cette maison-là).
Un autre moment de douceur, celui du dessert, lorsque G. a plongé avec délice sa petite cuillère dans un des petits pots au chocolat et au caramel au beurre salé préparés un soir de pluie d'après une recette simplissime de Philippe Conticini. Si vous les servez à température ambiante, la crème au chocolat sera moelleuse et réconfortante, c'est cette version que je préfère, mais il restait deux petits pots que j'ai mis au réfrigérateur pour le lendemain, il ne s'agit alors plus du tout du même dessert, la crème étant devenue ganache et laissant en bouche une sensation "plus riche". Philippe Conticini utilise du beurre doux pour le caramel et saupoudre au dernier moment les petites crèmes de fleur de sel. Comme je n'en avais pas, j'ai fait un caramel au beurre salé. Il parsème aussi les crèmes de pralin mais après concertation multidisciplinaire, il fut décidé de s'abstenir.
Les petits pots très doux chocolat/caramel au beurre salé
Pour quatre petits pots
La crème au chocolat
-150g de chocolat à 66% de cacao
-5cL de lait
-7cL de crème fraîche
Le caramel au beurre salé (je n'ai pas tout utilisé pour les petits pots, il est très bon avec les yaourts aussi)
-150g de sucre
-3 cuillères à soupe d'eau
-5cL de lait
-5cL de crème fraîche
-10g de beurre salé
Et pour servir: des gavottes et quelques gouttes de crème fraîche
Commencer par préparer le caramel: faire cuire le sucre et l'eau dans une casserole à fond épais. En attendant qu'il prenne une couleur blond foncé, faire bouillir le lait et le crème. Quand le caramel est presque roux, verser le mélange lacté bouillant en trois fois et bien mélanger. Laisser reposer.
Pour la crème au chocolat, faire chauffer le lait et la crème et verser ce mélange très chaud sur le chocolat préalablement concassé. Mélanger doucement.
Répartir la crème au chocolat encore chaude dans les verres, recouvrir d'une petite couche de caramel et d'une goutte de crème fraîche. Laisser refroidir à température ambiante.
Déguster avec les gavottes, contrepoint délicieusement craquant à toute cette onctuosité.
D'autres recettes de Philippe Conticini à déguster sans alibi:
Une crème renversée à tomber
Une indécente pizza chocolabricot
Elle porte des chemises de garçon trop grandes pour elle et dont elle laisse toujours défaits les boutons des poignets. Les pantalons aussi sont larges, et elle ne quitte jamais sa grande besace noire qui lui bat les cuisses quand elle prend le train (et cela arrive souvent, pour aller rendre visite à ses parents par exemple. Et j'ai été saisie par les silences laconiques de son père quand il vient la récupérer à la gare. Pour avoir plusieurs fois vécu ces instants-là, je ne peux que reconnaître la justesse du propos: moi aussi, quand mon papa venait me chercher le vendredi soir à la gare de L., j'étais toute embarrassée. Heureuse de le voir mais aussi très gênée de n'avoir rien à dire, avoir peur qu'il s'en rende compte, qu'il pense que je ne l'aime plus mais en même temps incapable de partager avec lui les émotions qui m'habitaient alors, puisqu'il ne m'avait connu qu'à la maison, dans mes pensées adolescentes et qu'elles n'étaient plus tout à fait d'actualité. Incapable d'échanger des banalités ("Il y avait du monde dans le train?" question que posera aussi la belle-mère de Yoko quand ils arriveront à la maison), je me terrais dans un silence qui était probablement très angoissant).
Yoko est journaliste.
Dans son petit studio à Hokkaido, il y a une belle suspension rouge qui descend du plafond, il y a un petit balcon où elle étend son linge avec une grâce sans concurrence (et les fins tee shirts qui se balancent au gré du vent dessinent son grand corps frêle), il y a un réfrigérateur dont sa belle-mère reprochera la vacuité. Il est vrai qu'on ne voit guère Yoko ingurgiter autre chose que plusieurs verres de lait froid et des nouilles instantanées.
Yoko passe beaucoup de temps avec Hajime, un gentil libraire qui trvaille dans le quartier des bouquinistes et qui s'y connait non seulement en graphisme mais aussi en nourritures réconfortantes pour jeunes filles malades.
Dans Café Lumière, le très beau film de Hou Hsiao-Hsien, que j'avais déjà vu un 31 décembre parisien avec G. avant d'aller déguster quelques sushis, se déploie avec beauté et intelligence l'histoire de Yoko qu'on contemple rêver à l'avant des trains ou siroter un lait chaud attablée dans un beau café boisé, sur les traces d'un compositeur disparu et se débattant avec ses propres secrets. Un bonheur pour les yeux et les oreilles (car la bande sonore n'est pas en reste), à déguster un dimanche matin en même temps qu'une tasse de thé vert délicatement parfumé à la fleur de cerisier (le hanami impérial de cette maison-là).
Un autre moment de douceur, celui du dessert, lorsque G. a plongé avec délice sa petite cuillère dans un des petits pots au chocolat et au caramel au beurre salé préparés un soir de pluie d'après une recette simplissime de Philippe Conticini. Si vous les servez à température ambiante, la crème au chocolat sera moelleuse et réconfortante, c'est cette version que je préfère, mais il restait deux petits pots que j'ai mis au réfrigérateur pour le lendemain, il ne s'agit alors plus du tout du même dessert, la crème étant devenue ganache et laissant en bouche une sensation "plus riche". Philippe Conticini utilise du beurre doux pour le caramel et saupoudre au dernier moment les petites crèmes de fleur de sel. Comme je n'en avais pas, j'ai fait un caramel au beurre salé. Il parsème aussi les crèmes de pralin mais après concertation multidisciplinaire, il fut décidé de s'abstenir.
Les petits pots très doux chocolat/caramel au beurre salé
Pour quatre petits pots
La crème au chocolat
-150g de chocolat à 66% de cacao
-5cL de lait
-7cL de crème fraîche
Le caramel au beurre salé (je n'ai pas tout utilisé pour les petits pots, il est très bon avec les yaourts aussi)
-150g de sucre
-3 cuillères à soupe d'eau
-5cL de lait
-5cL de crème fraîche
-10g de beurre salé
Et pour servir: des gavottes et quelques gouttes de crème fraîche
Commencer par préparer le caramel: faire cuire le sucre et l'eau dans une casserole à fond épais. En attendant qu'il prenne une couleur blond foncé, faire bouillir le lait et le crème. Quand le caramel est presque roux, verser le mélange lacté bouillant en trois fois et bien mélanger. Laisser reposer.
Pour la crème au chocolat, faire chauffer le lait et la crème et verser ce mélange très chaud sur le chocolat préalablement concassé. Mélanger doucement.
Répartir la crème au chocolat encore chaude dans les verres, recouvrir d'une petite couche de caramel et d'une goutte de crème fraîche. Laisser refroidir à température ambiante.
Déguster avec les gavottes, contrepoint délicieusement craquant à toute cette onctuosité.
D'autres recettes de Philippe Conticini à déguster sans alibi:
Une crème renversée à tomber
Une indécente pizza chocolabricot
15 Comments:
Tout donne envie: l'évocation que tu fais de ce film, sensible et poétique, et la recette que tu y associes. Alors je crois que je vais me laisser tenter par les deux...
J'aime quand tu parles de cinéma avec cette douceur infinie et en même temps douloureuse. C'est tellement beau qu'on voudrait que ça ne s'arrête jamais. Ou qu'on voudrait justement arrêter le temps, le temps de reprendre son souffle peut-être...
Les grands esprits se rencontrent ;-) Je goûterais bien à tes petits pots tout doux... (non pas que les miens soient spécialement "explosifs", mais Crevette dit toujours "pots explosifs au chocolat", alors j'ai gardé ce qualificatif, qui me plaît beaucoup).
j'ai le thé sakura...il ne me reste plus que le film à trouver. j'adore la litterature et le cinema qui vient d'asie...in the mood for love, , 2046, en fait tout wong kar wai et bien d'autres... le secret des poignards volants...enfin bref, j'ai pas vu le titre du film (j'ai relu 2 fois) mais faut m'excuser, je n'ai pas encore mangé de la journée et j'ai repris le travail ce matin! ton blog me plait enormement, c'est toujours un plaisir de te lire. bonne soirée. océane
doublon gagnant : tu m'as donné envie de voir illico presto ce film méconnu et de faire ces petites crèmes !
merci beaucoup !
J'adore ta façon de raconter les films sous le charme desquels tu es tombée ...
Je l'avais également repérée cette jolie recette de Philippe Conticini !
Je lis ton post et je me laisse tellement prendre pas ton récit et envahir d'émotions que je ne sais plus quoi dire, comme d'habitude... Je dis quand-même: je veux voir ce film! Tu donnes vraiment envie. Avec la crème au chocolat en prime, pourquoi pas...
Un billet très agréable agrémenté de douces crèmes au chocolat. C'est un plaisir de venir chez toi.
Je te souhaite une bonne journée.
Exactement ce dont j'ai besoin en ce moment...
Tu sais quoi? Tu devrais ouvrir un cine-club ou tu servirais de desserts, du the. Un truc avec plein de coussins.
Je plébiscite l'idée de Gracianne, je rêve d'un endroit de ce genre...
Le caramel au beurre salé, un péché gourmand de plus, mais parfaitement assumé!
ton texte est joliment écrit, quant aux petites crèmes elles sont vraiment réussies
Bon, une fois n'est pas coutume, je laisserai les crèmes de côté (commençons la rentrée du bon pied et oublions les reliefs inphotoshopables que les kouign amann ont laissé sur ma silhouette ordinairement élancée), et me pencher plutôt sur le film, que je ne connais pas du tout, mais il n'est jamais trop tard!
Gracianne a trouvé la parade : le ciné-club-teafortwo de Patoumi ...
Merci pour toutes ces pensées.
Je découvre ton blog, il est très agréable. Tu écrit très bien. Je reviendrai,
Nathalie Valmary
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