En aparté (2) -il y a des choses qu'on ne sacrifie pas aux printemps qui tardent-
Les jeudis midis ont une texture toute particulière depuis que j'ai décidé d'essayer chaque semaine un nouvel endroit où déjeuner. J'ai l'impression de revêtir mon trench d'Inspectrice Gadget et je me sens investie d'une mission de grande importance (j'ai un petit malaise en écrivant cela parce que je viens d'écouter une émission de France Culture sur les bourreaux ordinaires. On se sent tout petit et tout futile quand on a entendu Jean Hatzfeld ou Rithy Panh. Je me suis longtemps demandée d'où venait mon intérêt pour la Shoah, jusqu'à ce que je sois capable de m'avouer que ce n'était qu'une façon de se préoccuper, en se maintenant à distance, du génocide qui avait touché mon propre peuple).
Ce midi, sous un soleil hésitant, j'ai choisi d'aller aux Pieds dans le plat, un tout petit restaurant en face de l'Eglise du Vieux Saint-Etienne où j'avais vu un soir d'hiver une pièce de Fassbinder qui s'appelait "Preparadise sorry now". J'avais remarqué Les pieds dans le plat en sortant du très joli salon de thé-restaurant-librairie (qui sert l'été un délicieux gaspacho fraise-tomate) situé juste à côté, Histoire de thés, un soir après avoir bu un thé Ikebana avec une gentille bloggueuse. J'ai un avis très mitigé sur Histoire de thés, il faudrait que j'y retourne (probablement très prochainement vu l'ardoise qu'il y avait aujourd'hui, affichant du pain perdu à l'orange et de la tarte à la nougatine).
J'avais appelé la semaine dernière aux Pieds dans le plat pour réserver une table à dîner, mais la dame m'avait gentiment expliqué que le soir, elle n'ouvrait que pour des soirées privées. Qu'il fallait alors lui indiquer le nombre de personnes (au moins dix) et qu'on pouvait ensuite établir un menu ensemble. Elle avait l'air gentille. Je m'étais promis d'essayer dès qu'un déjeuner dehors se présenterait.
Quand je suis arrivée, un peu après midi, elle m'a d'abord dit que tout était réservé (argh) mais finalement, elle m'a laissée m'installer à une petite table "où les gens arriveraient tard" (ouf). Elle m'enjoignit de plutôt m'asseoir avec vue sur l'église "C'est quand même plus joli".
L'endroit est tout petit mais on n'a pas l'impression d'étouffer. Aux murs il y a des gravures, le mobilier est en bois foncé, les tables sont en galva patiné ou recouvertes de papier journal verni. Il y a des petits bouquets de roses dispersés et au dessus de la porte des cuisines, une discrète Cène. Je vais aux toilettes me laver les mains et je suis contente d'y voir, parmi d'autres choses en noir et blanc, une vieille carte de téléphone, 50 unités, avec Jeanne Moreau, le combiné à l'oreille dans Ascenseur pour l'échafaud (je crois).
Au menu ce jour-là:
Deux entrées:
*Nem de sardine (que choisira mon voisin et qui a l'air délicieux)
*Tomates, pesto et mozzarella (vue la saison, j'ai du mal à croire à ce plat mais bon)
Trois plats:
*Boeuf à la marocaine
*Tourte de crevettes aux légumes verts et au curry léger
*Tartiflette
Un plateau de fromages AOC
Deux desserts:
*Tiramisu
*Fondant au chocolat et crème anglaise
Rien de très révolutionnaire mais de délicieux parfums se mêlaient à la bande-son très rock des années soixante, créant ainsi un climat des plus engageants.
En apercevant l'assiette de mon autre voisin qui avait choisi le boeuf à la marocaine, je décidai d'opter pour la même chose. En attendant (très peu de temps) d'être servi, on peut compulser les Libé mis à disposition.
La dame, tout en douceur et carré châtain, m'a alors apporté une assiette fumante où j'ai pu mélanger sans complexe ma semoule cuisson parfaite à la sauce réduite et parfumée qui accompagne sans les noyer le boeuf si fondant qu'on pourrait le manger à la petite cuillère et les légumes qui assurément ne sortent pas d'une boîte. Ce plat n'a rien d'inédit, ni d'innovant mais il est parfaitement réalisé, c'est tout à fait ce qu'on a envie de manger un jour un peu froid, en regardant les nuages au-dessus d'une église, entre deux grandes plages de travail. Si je ne finis pas mon assiette, c'est vraiment par coquetterie.
La clientèle qui m'entoure peu à peu est presque exclusivement masculine, toute en pulls col V et écharpes en laine. Ils parlent de graphisme, de Patti Smith et du programme du festival Mythos.
J'avais d'abord pensé à goûter au tiramisu et puis j'ai songé que je n'aimais que mon tiramisu, aux pavesini et avec une couche de chocolat fondu sur chaque couche de crème et j'avoue que j'ai choisi le fondant au chocolat avec une certaine résignation. C'est quand même un dessert très éprouvé. J'en étais déjà lasse avant d'y avoir goûté. Mais c'est alors qu'elle m'apporta un large triangle sombre, recouvert de cacao, dont la pointe reposait sur une nappe raisonnable de crème anglaise, vraisemblablement maison. La première bouchée leva mes réticence. C'était très bon, pas gras, pas trop sucré, chocolaté juste ce qu'il faut. Rien de spectaculaire, juste un goût très agréable. J'ai fini ma part et j'ai même un peu raclé mon assiette bordée de boutons de roses avec plaisir.
L'addition m'est annoncée avec presque timidité et je quitte ravie Les pieds dans le plat, me promettant d'y amener G. dès que l'occasion se présenterait.
Les pieds dans le plat
43 rue de Dinan
35000 Rennes
0299673155
Merci à Arnaud Cathrine, pour le titre.
Ce midi, sous un soleil hésitant, j'ai choisi d'aller aux Pieds dans le plat, un tout petit restaurant en face de l'Eglise du Vieux Saint-Etienne où j'avais vu un soir d'hiver une pièce de Fassbinder qui s'appelait "Preparadise sorry now". J'avais remarqué Les pieds dans le plat en sortant du très joli salon de thé-restaurant-librairie (qui sert l'été un délicieux gaspacho fraise-tomate) situé juste à côté, Histoire de thés, un soir après avoir bu un thé Ikebana avec une gentille bloggueuse. J'ai un avis très mitigé sur Histoire de thés, il faudrait que j'y retourne (probablement très prochainement vu l'ardoise qu'il y avait aujourd'hui, affichant du pain perdu à l'orange et de la tarte à la nougatine).
J'avais appelé la semaine dernière aux Pieds dans le plat pour réserver une table à dîner, mais la dame m'avait gentiment expliqué que le soir, elle n'ouvrait que pour des soirées privées. Qu'il fallait alors lui indiquer le nombre de personnes (au moins dix) et qu'on pouvait ensuite établir un menu ensemble. Elle avait l'air gentille. Je m'étais promis d'essayer dès qu'un déjeuner dehors se présenterait.
Quand je suis arrivée, un peu après midi, elle m'a d'abord dit que tout était réservé (argh) mais finalement, elle m'a laissée m'installer à une petite table "où les gens arriveraient tard" (ouf). Elle m'enjoignit de plutôt m'asseoir avec vue sur l'église "C'est quand même plus joli".
L'endroit est tout petit mais on n'a pas l'impression d'étouffer. Aux murs il y a des gravures, le mobilier est en bois foncé, les tables sont en galva patiné ou recouvertes de papier journal verni. Il y a des petits bouquets de roses dispersés et au dessus de la porte des cuisines, une discrète Cène. Je vais aux toilettes me laver les mains et je suis contente d'y voir, parmi d'autres choses en noir et blanc, une vieille carte de téléphone, 50 unités, avec Jeanne Moreau, le combiné à l'oreille dans Ascenseur pour l'échafaud (je crois).
Au menu ce jour-là:
Deux entrées:
*Nem de sardine (que choisira mon voisin et qui a l'air délicieux)
*Tomates, pesto et mozzarella (vue la saison, j'ai du mal à croire à ce plat mais bon)
Trois plats:
*Boeuf à la marocaine
*Tourte de crevettes aux légumes verts et au curry léger
*Tartiflette
Un plateau de fromages AOC
Deux desserts:
*Tiramisu
*Fondant au chocolat et crème anglaise
Rien de très révolutionnaire mais de délicieux parfums se mêlaient à la bande-son très rock des années soixante, créant ainsi un climat des plus engageants.
En apercevant l'assiette de mon autre voisin qui avait choisi le boeuf à la marocaine, je décidai d'opter pour la même chose. En attendant (très peu de temps) d'être servi, on peut compulser les Libé mis à disposition.
La dame, tout en douceur et carré châtain, m'a alors apporté une assiette fumante où j'ai pu mélanger sans complexe ma semoule cuisson parfaite à la sauce réduite et parfumée qui accompagne sans les noyer le boeuf si fondant qu'on pourrait le manger à la petite cuillère et les légumes qui assurément ne sortent pas d'une boîte. Ce plat n'a rien d'inédit, ni d'innovant mais il est parfaitement réalisé, c'est tout à fait ce qu'on a envie de manger un jour un peu froid, en regardant les nuages au-dessus d'une église, entre deux grandes plages de travail. Si je ne finis pas mon assiette, c'est vraiment par coquetterie.
La clientèle qui m'entoure peu à peu est presque exclusivement masculine, toute en pulls col V et écharpes en laine. Ils parlent de graphisme, de Patti Smith et du programme du festival Mythos.
J'avais d'abord pensé à goûter au tiramisu et puis j'ai songé que je n'aimais que mon tiramisu, aux pavesini et avec une couche de chocolat fondu sur chaque couche de crème et j'avoue que j'ai choisi le fondant au chocolat avec une certaine résignation. C'est quand même un dessert très éprouvé. J'en étais déjà lasse avant d'y avoir goûté. Mais c'est alors qu'elle m'apporta un large triangle sombre, recouvert de cacao, dont la pointe reposait sur une nappe raisonnable de crème anglaise, vraisemblablement maison. La première bouchée leva mes réticence. C'était très bon, pas gras, pas trop sucré, chocolaté juste ce qu'il faut. Rien de spectaculaire, juste un goût très agréable. J'ai fini ma part et j'ai même un peu raclé mon assiette bordée de boutons de roses avec plaisir.
L'addition m'est annoncée avec presque timidité et je quitte ravie Les pieds dans le plat, me promettant d'y amener G. dès que l'occasion se présenterait.
Les pieds dans le plat
43 rue de Dinan
35000 Rennes
0299673155
Merci à Arnaud Cathrine, pour le titre.